La Banque d’Angleterre achève son virage politique
Le parlement britannique a entendu cette semaine le gouverneur de la Banque d’Angleterre Andrew Bailey, la vice-gouverneure Clare Lombardelli et les membres du comité de politique monétaire Megan Greene et Alan Taylor. Lors d’une audition devant la commission du Trésor de la Chambre des Communes, ces derniers ont présenté le rapport annuel de la banque centrale et ont donné leur point de vue sur ce à quoi il faut s'attendre pour les mois à venir. À l’exception de Taylor, tous sont restés sur la trajectoire entamée après la réunion d’août.
Depuis août de l’année dernière, la banque centrale britannique est en mode pilotage automatique. Elle a abaissé son taux directeur tous les trimestres de 25 points de base (pb). Ce dernier est ainsi passé de 5,25 % à 4 % aujourd'hui. Si Bailey ne doute pas que le taux devra encore être réduit à terme, il remet toutefois en question le rythme actuel. Les marchés monétaires britanniques ont bien compris le message et estiment la probabilité d’une nouvelle intervention cette année à seulement 40 %. Le prochain assouplissement de 25 pb n’est anticipé que pour la fin du premier trimestre de l’année prochaine.
La vice-gouverneure Lombardelli est allée encore un pas plus loin. Elle estime que la politique restrictive actuelle a déjà abouti à un taux proche de son niveau neutre et évalue le taux d'intérêt d'équilibre théorique dans le haut de la fourchette de 2 %-4 % avancée par la BoE. La "vielle dame de threadneedle street" est pratiquement arrivée au bout et cela est entièrement dû à une inflation tenace. En août, la banque centrale avait averti que la hausse des prix atteindrait un pic de 4 % en septembre. Lombardelli craint que des niveaux d’inflation de l'ordre de 3,5 % à 4 % ne deviennent la norme d’ici la fin de l’année. La montée des prix de l’énergie et de l’alimentation risque en outre d’influencer les anticipations des ménages et des entreprises, a par ailleurs déclaré Greene. Alan Taylor, son collègue du comité monétaire, est le seul à s'inquiéter des risques de ralentissement économique liés au maintien prolongé d'une politique monétaire trop restrictive, mais il semble de plus en plus isolé. Début août, il avait ramené sa proposition de réduction de taux de 50 à 25 pb pour obtenir une majorité serrée de 5 voix contre 4.
Le niveau absolu des taux d’intérêt ne soutient pas la livre sterling en raison de la dynamique inflationniste. D’un point de vue relatif, l’écart entre les taux à court terme au Royaume-Uni et en Europe oscille depuis quelques mois entre 180 et 190 pb. Du côté européen, le marché s’est aligné sur le statu quo annoncé de la BCE. La question budgétaire a souvent été citée ici comme un point sensible pour les actifs britanniques. La ministre des Finances, Rachel Reeves, a annoncé cette semaine la date d’un nouveau duel avec le marché. Le 26 novembre, elle présentera son budget pour l’année prochaine. Elle cherche à récolter environ 50 milliards de livres sterling sans renoncer à la discipline budgétaire qu'elle s'est imposée ni augmenter à nouveau les impôts, mais tout en tenant ses généreuses promesses d'investissement. Une mission impossible.
EUR/GBP : la livre sterling dans une situation délicate.