Le sort de la livre sterling est entre les mains de la BoE
C’est la semaine de vérité pour la livre sterling. La semaine dernière, nous évoquions une rupture à la baisse imminente non seulement face à l’euro, mais aussi face au dollar. Le cours EUR/GBP s’est déjà aventuré au-dessus de 0,88, tandis que le cours GBP/USD se négocie en dessous de la ligne de cou de 1,314 d’une formation à double sommet. La tension monte à l’approche de la réunion de politique monétaire de la Banque d’Angleterre (BoE) ce jeudi. Le marché accorde à peine une probabilité de 1 sur 3 à un abaissement à partir des 4% actuels. Cela nous paraît une sous-estimation grossière: il y a une marge de manœuvre, vu le pic plus faible que prévu de l’accélération de l’inflation (3,8% au lieu de 4%) et l’atténuation de la pression sur les prix de l’alimentation. Ajoutons à cela les hausses imminentes d’impôts (sur le revenu), de nature à freiner la croissance, et la BoE a une raison supplémentaire d’intervenir en sens inverse: c’est le principe “leaning against the wind”. Avec un nouvel abaissement, la BoE maintiendrait un rythme trimestriel étayé par de nouvelles projections économiques. Et les banques centrales gagnent à être prévisibles. Pour la livre, les risques sont donc orientés à la baisse cette semaine. Une rupture soutenue du cours EUR/GBP au-delà de 0,88, et du cours GBP/USD en deçà de 1,314, ouvrirait la voie à 0,8868-0,90 dans un cas et à 1,2945-1,2709 dans l’autre.
Cette semaine, nous nous tournons aussi vers les États-Unis. Mercredi, la Cour suprême entendra les arguments de l’administration Trump en faveur du maintien des tarifs douaniers réciproques et liés au fentanyl, entre autres. Il y a quelques mois, certains tribunaux inférieurs les avaient jugés illégaux, tout en permettant qu’ils restent en vigueur jusqu’à l’arrêt de la Cour suprême. En principe, la Maison-Blanche est en bonne position: six des neuf juges sont de souche républicaine, dont trois ont été nommés par Trump lui-même. Pourtant, si Washington devait faire machine arrière, il y aurait des alternatives, selon le gouvernement même. Le commerce mondial est sur le qui-vive.
Aux États-Unis, un nouveau mois va de pair avec de nouveaux chiffres. Il n’y aura hélas pas de rapport sur l’emploi et les postes vacants; mais les observateurs pourront se consoler avec l’indice ISM de confiance des entreprises, l’indice de confiance des consommateurs du Michigan et le rapport privé sur l’emploi d’ADP, qui pourront créer des remous.
Le marché s’accorde plus ou moins sur le point final du cycle de taux de la Fed. Or le moment où ce creux de 3% serait atteint reste insaisissable. La semaine dernière, la communication claire du président Powell a eu pour effet de le repousser très loin, autour du T1 2027. Nous soupçonnons que c’est pour cela que le dollar est actuellement plus sensible aux mauvaises nouvelles. Ce serait une bonne chose pour les concurrents du dollar. Le cours EUR/USD plie et tend vers les nadirs d’août, à 1,1392. Le cours USD/JPY se heurte à un seuil de résistance à 154,39 (reprise de 76,4% sur la baisse de janvier-avril). Le DXY pondéré des échanges commerciaux vise la frontière symbolique de 100.
Outre la Banque d’Angleterre, d’autres institutions monétaires s’exprimeront cette semaine. La banque centrale tchèque prêche le statu quo depuis longtemps et ne changera pas de ton jeudi. Après les taux d’inflation publiés la semaine dernière, nous anticipons plutôt un nouvel abaissement de taux en Pologne, à 4,25%. En Australie, la RBA plaide en faveur d’une pause prolongée depuis le mois de septembre. Dur à la détente, le marché a eu besoin d’une prolongation de la trêve commerciale sino-américaine et d’une hausse surprise de l’inflation pour renoncer à son idée. Pour terminer, après l’abaissement opéré en septembre, les Norvégiens ont proposé un processus de normalisation extrêmement progressif – à savoir, une réduction par an jusqu’en 2028. Reste à voir si ce cap sera tenu cette semaine.
GBP/USD: la livre face au moment de vérité