Un petit reset tchèque, mais rien de fondamental
Hier, les taux d’inflation tchèques ont assez brutalement mis fin à une hausse continue des taux. Le dernier mouvement haussier avait commencé le 20 octobre et s'est traduit par une augmentation de 22 à presque 30 points de base (pb), échéances (plus) courtes en tête. C’est la logique économique même : l’économie se porte bien, les fortes hausses des salaires alimentent l'important moteur de croissance qu'est la consommation privée et la politique budgétaire est moins restrictive. En octobre, l’inflation était passée au-dessus de l’objectif de 2 % de la banque centrale tchèque (CNB). Cela fait déjà plusieurs mois que cette dernière maintient son taux directeur à 3,5 %, un niveau qui pèse légèrement sur l’économie (et in fine sur l’inflation). Le marché voyait quant à lui déjà plus loin en anticipant des premiers relèvements en 2026.
Le net ralentissement de la dynamique mensuelle des prix entraîne aujourd'hui un petit reset de la perception de marché. Les prix en Tchéquie ont chuté de 0,3 % sur une base mensuelle le mois dernier, faisant ainsi reculer le chiffre annuel à 2,1 %. Les analystes s’attendaient pour leur part au même taux qu'en octobre, c'est-à-dire 2,5 %. Quant à la banque centrale, elle avait bien anticipé un essoufflement, mais à 2,2 %. Les taux swap tchèques ont perdu jusqu'à 7,5 pb sur la partie courte de la courbe. Le taux à deux ans se rapproche ainsi de la ligne de tendance haussière de 2025. La devise a reçu un petit coup. Le cours EUR/CZK a dépassé 24,2. Dans une perspective plus large, la couronne s'échange toujours à ses niveaux les plus hauts de ces deux dernières années.
Les chiffres doivent être nuancés. La chute mensuelle des prix fait, par exemple, suite à une hausse plus forte que prévu en octobre. Elle est en outre influencée par des composantes volatiles qui, en principe, ne disant pas grand chose de la situation réelle. Avec une contraction de 0,8 % en glissement mensuel, les prix de l'alimentation mènent le mouvement. Vient ensuite l’énergie (-0,3 %). L'indicateur qui ne tient pas compte de l'évolution des prix dans ces deux secteurs (inflation de base) est passé de 3,2 % à 3 %, soit le plafond de la fourchette de tolérance de 2 % +/- 1 pt. Un autre baromètre, particulièrement important aux yeux de la CNB, est celui des prix des services. Avec 4,6 % en glissement annuel (0,1 % en glissement mensuel), ceux-ci ont progressé au même rythme qu'en octobre et toujours beaucoup plus qu'avant la pandémie. Il s’agit d’une conséquence directe de la forte croissance des salaires. Au trimestre dernier, les travailleurs tchèques ont vu leurs revenus grimper de 7,1 % par rapport à l’année précédente, soit un taux qui compense largement l’inflation. Cela montre à quel point la consommation privée joue un rôle de moteur pour l'économie.
Nous nous attendons à une baisse temporaire de l’inflation au début de l’année prochaine, à 2 % voire moins, mais en raison de la suppression d’une taxe sur l’énergie, soit un facteur qui n'a rien de structurel. La clé réside dans la dynamique des salaires mentionnée ci-dessus. Il s'agit de l’une des principales préoccupations de la banque centrale, avec la surchauffe du marché immobilier qui y est liée. La croissance salariale actuelle a pour effet d'attiser l’inflation dans le secteur des services et rend plus difficile (voire empêche) un retour franc à l’objectif général de 2 %. Ce n’est qu’en dessous de 5 % que le caractère inflationniste de cette croissance pourra s’estomper. Mais cela ne devrait selon nous pas arriver avant 2027-2028. D'ici là, la CNB n’aura d’autres choix que de rester pendant longtemps dans une posture attentiste. Malgré le mouvement d'hier, le marché monétaire n'a toujours pas totalement abandonné l'idée d'une première hausse de taux vers la fin de l'année prochaine.
Le taux des swaps à deux ans tchèques se rapprochent d'une ligne de tendance haussière.