La messe sera-t-elle dite avec les payrolls de septembre ?
Mettre un terme à une correction boursière globale ? Nvidia peut le faire. Hier, la plus grande entreprise au monde a publié ses résultats d’exploitation pour le troisième trimestre. L’enjeu était de taille : ces derniers jours, le marché s'est posé des questions sur le niveau extrêmement élevé des valorisations des entreprises technologiques et, plus particulièrement, du secteur de l'intelligence artificielle. Le constat est sans appel : Nvidia a pulvérisé les attentes des analystes. [sarcasme on - off]. La bourse est sauvée, tout le monde peut respirer.
Cette influence exercée par une seule entreprise sur l'ensemble du marché boursier, tant national qu'international, est disproportionnée. Et ce n'est pas rassurant. Mais la réalité est ce qu’elle est. Et ce n'est pas tout : aujourd’hui, c'est au tour du marché obligataire d'être exposé à une seule source de risque. Le Bureau américain des statistiques du marché du travail (Bureau of Labor Statistics, BLS) publiera tout à l'heure son rapport sur le marché de l’emploi de septembre, qui avait été reporté à cause du shutdown. Il s’agit probablement de l'information la plus importante que la banque centrale américaine (Fed) recevra encore avant sa réunion de politique du 10 décembre. Hier, le BLS a en effet annoncé qu’il allait intégrer (certaines parties de) la version d’octobre à celle de novembre, pour une publication le 16 décembre. Sans chiffres pour clarifier la situation de l’économie et face aux importantes dissensions au sein de la Fed, le marché table de plus en plus sur un statu quo en décembre. Il n'accorde désormais plus qu'une probabilité de 30 % à une troisième baisse consécutive des taux. La messe pourrait être dite aujourd'hui avec la parution des payrolls, pourtant dépassés, de septembre. Un chiffre faible à modéré permettrait dans un premier temps de mieux équilibrer le marché monétaire. Dans notre scénario privilégié, la balance penche en faveur d’une réduction de taux le mois prochain, à 3,5-3,75 %. Les taux d’intérêt à court terme américains pourraient alors, en principe, se replier au sein de leur fourchette latérale comprise entre 3,4 et 3,65 %. Un rapport solide enterrerait les arguments, ou ce qu’il en reste, en faveur d'un assouplissement.
La situation en France ne constitue pas un risque au sens strict du terme, mais elle a tout de même une influence sur les marchés (européens). Nous avons déjà évoqué en début de semaine la date butoir de dimanche prochain. Le Parlement se penchera ce jour-là sur le projet de budget pour l’année prochaine. Mais les milliers (littéralement) d’amendements apportés à la proposition initiale de Lecornu ont débouché sur un texte dans lequel plus personne ne se retouve, comme l'a confié ce matin le chef de la commission des finances au journal d’affaires britannique Financial Times. La probabilité que le parlement donne son feu vert est faible. Cela signifie que la France devra très probablement adopter un système des douzièmes provisoires, basé sur les dépenses de 2025, l'année prochaine. Le budget – et donc aussi le déficit – de cette année sera de facto repris. Et plus cette situation durera, plus les ambitions de Lecornu II de lutter contre le dérapage des finances publiques deviendront irréalisables. Le marché ne l’acceptera pas. Le calme relatif qui régnait ces derniers jours autour des primes de risque de crédit commence déjà à montrer de premiers signes de rupture ce matin.
Primes de risque de crédit : la France (et la Belgique) en plus mauvaise posture que l’Italie (et l’Espagne).