La livre sterling dos au mur
près 43 jours, le plus long "shutdown" de l'histoire de l'administration américaine a pris fin cette nuit. L’accord politique permet de débloquer temporairement des moyens pour les pouvoirs publics. Une prolongation ou une solution permanente devra néanmoins être décidée avant fin janvier, au risque de retourner à la case départ. Le démarrage en trombe des marchés boursiers cette semaine, avec notamment de nouveaux records pour le Dow Jones américain ou l'EuroStoxx50, est au moins en partie attribuable à (la perspective de) cet accord. L'incidence sur les marchés des taux et des changes est de nouveau extrêmement limitée, même si le dollar rencontre quelques difficultés aujourd’hui (EUR/USD > 1,16). D’un point de vue technique, le mouvement ne représente que peu de choses après la tentative échouée de passer sous la barre de 1,15 en début de mois.
La grande question est maintenant de savoir si et quand les chiffres américains qui n'ont pas pu être publiés seront disponibles. L'attachée de presse de la Maison-Blanche a d’ores et déjà laissé entendre que le rapport sur l’inflation d’octobre ne paraîtrait pas. Elle en est arrivée à la même conclusion pour les "payrolls", même si certains au sein du Bureau américain des statistiques du marché du travail (BLS) ont évoqué la possibilité de combiner les chiffres d’octobre et de novembre le 5 décembre. Cela ne changera toutefois rien au fait que la Fed devra continuer de naviguer à l'aveugle. La valeur des nouvelles enquêtes mensuelles est d'ores et déjà remise en question en raison du manque de données antérieures. Cela explique les fortes dissensions actuellement observées au sein de la Fed à propos de la marche à suivre en décembre, après les deux baisses préventives effectuées en septembre et octobre. Ce doute est également palpable sur le marché monétaire américain. Moins d’un mois avant la prochaine réunion de politique, celui-ci estime la probabilité d’un troisième assouplissement consécutif à 50 %. C'est tout à fait exceptionnel. Or, depuis la crise financière, la Fed et la BCE évitent autant que possible de surprendre (le marché).
Au Royaume-Uni, un marché auparavant divisé semble de plus en plus convaincu de l'issue de la prochaine réunion de la Banque d'Angleterre (BoE). Il estime désormais la probabilité d’un abaissement de taux à 86 %, après le vote très serré en faveur du statu quo (5 voix contre 4) au début du mois. Les chiffres publiés cette semaine renforcent encore ce scénario. Le rapport sur le marché de l’emploi a déçu, avec une nouvelle hausse du taux de chômage britannique à 5 %, le niveau le plus élevé depuis février 2021. À l’exception d’une stabilisation en juillet, celui-ci n'a pas cessé de grimper depuis le mois de mars. Ce matin, le chiffre du PIB du troisième trimestre montre que la croissance est passée de 0,3 % au cours des trois mois précédents à 0,1 %, au lieu du taux de 0,2 % espéré. La contribution de la consommation reste faible (0,2 % en glissement trimestriel). Tant les exportations que les importations et les investissements des entreprises se sont contractés. La longue fermeture des ateliers de production du plus grand constructeur automobile du pays (Jaguar Land Rover) après une cyberattaque et l’incertitude quant à la future politique budgétaire ont clairement pesé dans la balance.
La perte de soutien des taux, la faiblesse des chiffres et la perspective d'un budget prévoyant des hausses d'impôts sont tous des facteurs qui pèsent sur la livre sterling. Hier, le cours EUR/GBP a clôturé à son niveau le plus élevé depuis avril 2023. Le prochain seuil technique se situe à 0,8979, le sommet de 2023.
EUR/GBP (graphique hebdomadaire) : mauvaise passe pour la livre.