Orban met en œuvre tous les moyens (budgétaires)
Depuis fin 2022, l’économie hongroise traverse une période de stagnation. Ce n’est évidemment pas l’histoire que le gouvernement a envie de raconter aux électeurs au printemps. D’après les sondages, le gouvernement Orban aura du mal à conserver sa majorité. Le Premier ministre Orban et son bras droit, le ministre de l’Économie Nagy, mettent donc tout en œuvre pour présenter un message économique plus positif aux électeurs. Il y a quelques semaines, nous avions déjà signalé que le gouvernement avait tenté de convaincre la banque centrale (la MNB) de soutenir la croissance en abaissant son taux directeur (actuellement à 6,5%). Or le gouverneur Varga, qui fait pourtant partie de l’entourage d’Orban, n’a pas donné suite, refusant de compromettre la stabilité récemment retrouvée du forint.
Pas de soutien de la politique monétaire, donc. Raison de plus de miser sur une politique fiscale stimulante. Le gouvernement a déjà beaucoup déboursé avec des mesures visant à soutenir le pouvoir d’achat et la croissance, par le biais de réductions d’impôts et de bonifications d’intérêts. Surtout dans un contexte de croissance faible, cela entraîne inévitablement une hausse des déficits, ce que le gouvernement admet maintenant sans détour. Pour cette année, le déficit budgétaire a déjà été relevé de 3,7% à 4,3%. Hier, le gouvernement a admis qu’il devrait atteindre 5,0%, ce qui devient le nouvel objectif pour 2026, plutôt que les 3,7% inscrits au budget. Le financement repose en partie sur une augmentation de la taxe sur le secteur financier. Mais le gouvernement va aussi s’endetter davantage, notamment en émettant d’autres obligations en devises au début de l’année prochaine.
À vrai dire, la Hongrie n’a pas beaucoup de marge de manœuvre pour financer un déficit supplémentaire. Les agences de notation prennent note. Si le pays est noté BBB/Baa2 auprès de Fitch et Moody’s, c’est surtout auprès de S&P que la Hongrie risque de perdre son statut Baa3 “investment grade” si la situation fiscale continue à se détériorer. Curieusement, dans ce contexte, le Premier ministre Orban a indiqué hier que le président Trump lui a promis une ligne de crédit la semaine dernière, pour assurer la stabilité financière en cas de spéculation contre la devise ou de dégradation de la note de crédit. Orban a déclaré que si ce soutien était nécessaire, il serait inférieur aux 20 milliards de dollars récemment accordés à l’Argentine. Ce coup de pouce des États-Unis peut réconforter Orban, mais l’on peut se demander si la comparaison avec l’Argentine est la meilleure manière de convaincre les marchés.
Ces nouvelles budgétaires n’ont évidemment pas laissé les marchés de marbre, même si la réaction reste ordonnée. Ce sont principalement les primes de risque à l’extrémité longue de la courbe qui augmentent (taux souverain à 10 ans: +15 points de base). Vu l’incertitude accrue, il est encore plus difficile pour la MNB d’envisager un abaissement de taux, d’autant que les chiffres d’hier ont montré que l’inflation sous-jacente (hors alimentation: 4,7%) reste nettement supérieure à l’objectif de la MNB (3,0% ± 1,0%). Le forint aussi a reculé d’un cran. À EUR/HUF 385, la devise hongroise se maintient bien, compte tenu de la hausse observée plus tôt cette année (+6,5% par rapport à l’euro depuis le début de l’année). Surtout si le sentiment général à l’égard du risque se dégrade, le forint pourrait être vulnérable à une correction.
EUR/HUF: le forint a-t-il engrangé les gains les plus “faciles”?