EUR/GBP : prêt pour une rupture au-dessus de 0,87
es lettres en provenance de Washington n'ont pour le moment pas beaucoup d'incidence. Malgré l’imminence de l'échéance et la forte hausse des tarifs, le marché part du principe que les scénarios du pire seront finalement évités. Prenons le cas de l’UE. L’Europe se prépare à des droits de douane réciproques de 30 % à partir du 1er août, au lieu de 10 % actuellement. Un taux plus élevé que les 20 % annoncés lors du "Liberation Day", mais moins élevé que la menace de 50 % brandie par Trump précédemment. Et en ne s'engageant pas dans une surenchère, l’Europe préfère éviter l'escalade, preuve que la conclusion d'un accord-cadre avant la fin du mois demeure la piste privilégiée.
En attendant, nous nous penchons sur deux marchés spécifiques cette semaine. Tout d'abord, le marché des taux, et en particulier l’extrémité longue de la courbe. La semaine dernière, nous avions déjà expliqué que les courbes des taux se pentifiaient sous l’impulsion de la hausse des taux (très longs). Cette évolution a pour fil rouge le dérapage des finances publiques. Le taux à 30 ans américain a le cap technique de 5 % à portée de main, le taux à 30 ans japonais a testé son précédent record de 3,2 %, le taux swap à 30 ans européen a clôturé hier à son niveau le plus élevé depuis fin 2023 (2,89 %) et le taux à 30 ans britannique reste au-dessus du lot, à 5,4 %. Cette semaine, les discussions budgétaires au Parlement français et les élections au Sénat japonais pourraient une nouvelle fois montrer à quel point les marges du politique sont limitées pour résoudre la problématique budgétaire. Les taux d’inflation américains pourraient encore mettre de l'huile sur le feu. Le rapport du mois de juin est attendu cet après-midi aux États-Unis. Le président de la Fed, Jerome Powell, a fait monter les enchères lors du forum de la BCE à Sintra. Les trois publications de l’été détermineront si la Fed pourra encore abaisser son taux directeur en septembre. Jusqu’à présent, l’impact sur l’inflation (des marchandises) est resté plutôt limité, car les entreprises ont puisé dans leurs stocks ou ont réduit leurs marges. De récentes enquêtes suggèrent toutefois que le consommateur devra également payer sa part . Un net impact sur les prix aurait pour effet le report du premier assouplissement de la Fed, et inversement. Le marché table sur une inflation mensuelle de 0,3 % tant pour l’inflation générale que pour l’inflation de base. Sur une base annuelle, les taux se montent à respectivement 2,6 % (contre 2,4 %) et 2,9 % (contre 2,8 %).
La livre sterling se trouve aussi dans notre viseur. Le cours EUR/GBP est sur le point de franchir le cap de 0,87. Si l'on excepte le 11 avril 2025, il faut remonter à fin 2023 pour retrouver un tel niveau. Nouveau petit retour à Sintra. Lors du forum, le président de la Banque d'Angleterre (BoE), Andrew Bailey, a mis en garde contre les signaux en provenance du monde des entreprises faisant état d'un ralentissement de la croissance et d'un affaiblissement du marché du travail. Lors d'une interview accordée le week-end dernier, Bailey s'est exprimé plus en détail sur les conséquences possibles pour la politique monétaire. Pour l’instant, l’accent est mis sur des baisses de taux progressives (trimestrielles) et prudentes (25 points de base) dans un contexte d’inflation structurellement élevée. Si la balance commence à pencher davantage du côté des risques économiques baissiers, la banque centrale est alors prête à revoir sa copie. Nous reviendrons encore sur ce thème plus tard dans la semaine, lorsque nous disposerons du nouveau taux d’inflation britannique (juin) et que nous aurons entendu le discours que donne chaque année le président de la BoE à la résidence officielle du maire de la City de Londres, le cœur historique et financier de la capitale britannique.
Mathias Van der Jeugt, salle des marchés KBC