La Banque centrale hongroise met au point sa politique
Hier, la Banque centrale hongroise (MNB) a créé la surprise en abaissant son taux directeur normal de 15 points de base, de 0,9% à 0,75%. Elle justifie cette première réduction des taux depuis 2016 par des perspectives de croissance revues à la baisse (2020: 0,3%-2% au lieu de 2%-3%) et des prévisions d’inflation réduites pour de bon. En ce qui concerne la croissance, en apparence, il s’agit néanmoins de chiffres que les autres pays européens envieraient. En 2021, l’inflation de base sous-jacente risque de tomber en dessous de l’objectif d’inflation de 3%. Ces arguments traditionnels peuvent facilement être invoqués pour justifier l’assouplissement de la politique monétaire. Mais bien qu’elles soient pratiquement passées sous silence dans la déclaration de politique, nous pensons qu’il y a deux autres raisons au moins aussi importantes.
La première raison tient à l’instinct d’imitation. Au cours du mois dernier, la BCE et la Fed ont toutes les deux annoncé ou instauré de nouvelles mesures d’assouplissement de leur politique monétaire. Plus important encore, au niveau régional, les taux directeurs tchèque (0,25%) et polonais (0,1%) sont effectivement inférieurs au taux directeur hongrois pour la première fois depuis longtemps.
La deuxième raison est étroitement liée à la première. De par le taux hongrois “supérieur”, le forint est devenu relativement attrayant dans la région. Nous retombons alors dans la relation amour-haine que la MNB entretient avec sa monnaie: ces dernières années, la Hongrie ne s’est guère plainte de la faiblesse relative de sa monnaie, qui a favorisé la compétitivité de son marché. Or au cours de la crise de liquidités du mois de mars, le forint a dégringolé très vite. Trop vite: même pour la MNB, une telle crise de confiance était excessive. Début avril, le cours EUR/HUF atteignait un niveau proche de 370.
Au cours de cette période, parmi maints programmes d’incitation, la Banque centrale hongroise a orchestré une hausse bien calibrée du taux de dépôt hongrois à une semaine. L’objectif: sortir des liquidités en HUF du marché à des conditions particulièrement alléchantes pour endiguer la chute vertigineuse du forint. La MNB a atteint son but: elle décide elle-même de la quantité de liquidités qu’elle accepte et à quel taux. En pratique, cela revient à rémunérer toute quantité de forint au taux de dépôt maximal. Au début du mois, notamment grâce au climat de risque plus favorable, le cours EUR/HUF est redescendu sous 345.
Pour la MNB, cela revient à retomber dans l’excès inverse, comme en témoigne la mise au point d’hier. Outre la réduction du taux de base, elle a signalé que la rémunération des dépôts à une semaine serait réduit de 15 points de base. Voilà qui rend le forint un peu moins attrayant. Jusqu’à présent, la MNB n’a pas précisé si elle continuerait à absorber toutes les liquidités en HUF proposées. Quoi qu’il en soit, le marché des changes a reçu le message cinq sur cinq: pour la première fois depuis le mois de mai, le cours EUR/HUF est remonté au-dessus de 350. La MNB se fixe manifestement un objectif entre 350 et 360. Par conséquent, des mouvements inverses (un forint plus fort) pourraient inciter la MNB à revoir à nouveau le taux directeur (à la baisse).