Le débat sur le (faible) dollar reste ouvert

Hier, des "rumeurs" sur la politique commerciale américaine ont de nouveau pesé sur le sentiment vis-à-vis du dollar, qui s'était (provisoirement) amélioré après les discussions positives entre Pékin e Washngton... Le billet vert s’est à nouveau déprécié, en particulier par rapport aux devises asiatiques.
En fin de séance sur les marchés asiatiques, des "sources bien informées" ont laissé entendre qu'au cours de leurs discussions commerciales avec la Corée du Sud, les États-Unis auraient aussi mis sur la table la question de la valorisation (trop basse) de la devise coréenne (le won). Début mai, des rumeurs similaires avaient déjà circulé à propos de Taïwan et avaient provoqué une forte appréciation du dollar taïwanais. Au désespoir de la banque centrale, qui est intervenue sur le marché des changes. Même si cela n'est pas très judicieux en pleines négociations avec les États-Unis, Taïwan met tout en œuvre pour démontrer que l’excédent commercial élevé n’est PAS la conséquence d’une faiblesse artificielle de la monnaie. Par ailleurs, les États-Unis surveillent en permanence (y compris pour Trump) la politique commerciale et de change de ses principaux partenaires commerciaux sur la base de trois critères : un surplus commercial de plus de 15 milliards de dollars, un excédent de compte courant de plus de 3 % du PIB et des interventions unilatérales sur le marché des changes. Quiconque répond à deux de ces trois critères se retrouve dans le collimateur de Washington. Dans le dernier rapport de novembre de l’année dernière, sept pays, principalement asiatiques (Chine, Japon, Taïwan, Corée, Singapour et Vietnam), se sont retrouvés sur le banc des accusés. Le seul pays non asiatique pointé du doigt étant l’Allemagne!
Dans ce contexte, il n’est pas surprenant que les marchés en aient conclu que la politique de change faisait tout de même aussi partie des négociations, même si les États-Unis et leurs partenaires commerciaux ont tout intérêt à ne pas le souligner trop ouvertement. Le fait que les États-Unis, et surtout l’administration Trump, veulent un dollar plus faible n’est un un secret pour personne. Mais cela doit se faire dans un contexte approprié pour les États-Unis et, de préférence, pas de manière trop brusque. Et pas à cause d'une vague de ventes qui toucherait non seulement le billet vert, mais aussi les Treasuries et les actions. Dans le même temps, un renforcement du dollar ne doit, pour les États-Unis, pas nécessairement venir d'une amélioration des perspectives économiques et de prévisions de taux de la Fed plus élevées. À cet égard, les rumeurs d'hier ne tombent peut-être pas à un mauvais moment pour les États-Unis.
Cela renforce néanmoins le sentiment que le dollar reste coincé dans un schéma de "vente en cas de hausse" ("sell-on-upticks"). Des rebonds limités en cas de nouvelles (économiques) plus favorables et de taux à court terme plus élevés, mais des baisses plus prononcées en cas de moins bonnes nouvelles. Les taux longs jouent ici un rôle ambigu. Il y a peu, ils traduisaient encore un renforcement de la croissance US lié à la désescalade du conflit commercial. Mais la nervosité autour de l’important déficit budgétaire américain est toujours présente. Si la balance penche dans l'autre sens, nous risquons de nous retrouver dans un contexte de pression simultanée, tant sur les obligations américaines (longues) que sur le dollar. Cela nous ramène au scénario d'hier. Quid du billert vert si le taux à 30 ans américain repasse au-dessus du cap des 5 % ?Pour l'instant, la volonté et la politique de Trump ne donnent aucune raison de s'attendre à autre chose que des rebonds temporaires au sein d'une tendance baissière.
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