Reprise vigoureuse sur les marchés du travail
Les économies avancées entrent-elles progressivement dans la phase finale du cycle de reprise économique ? Cette question devient de plus en plus pertinente maintenant que la reprise économique commence à montrer des signes d'essoufflement, sur fond de persistance des pressions inflationnistes. Les derniers indicateurs avancés qui ont été publiés, comme les PMI ou les indicateurs de sentiment économique (ESI) de la semaine dernière, suggèrent en outre que le pic de croissance du cycle de reprise est derrière nous.
Chômage en baisse
En outre, de plus en plus de signes montrent que les marchés du travail sont aussi en train de se resserrer. Aux États-Unis, le dernier rapport sur l’emploi a "déçu", alors que les chiffres du chômage flirtent désormais avec des niveaux généralement associés à une situation de "plein emploi". La pénurie sur le marché de l’emploi n’est d’ailleurs pas un phénomène uniquement observé aux États-Unis. La pression s'accentue aussi en Europe. Les pénuries de main-d'œuvre commencent à préoccuper. Selon des enquêtes de la Commission européenne, plus de 20 % des entrepreneurs voient leur production freinée à cause d'un manque de travailleurs et ce, tant dans le secteur des services que dans l’industrie.
Une telle pénurie sur le marché de l’emploi montre que la croissance économique se heurte peu à peu à ses limites. Elle suggère que la main-d'œuve disponible se raréfie et que de nouveaux incitants risquent de se répercuter davantage dans l’inflation que dans la croissance, la fameuse courbe de Philips. Raison pour laquelle les chiffres du chômage – aux États-Unis mais aussi de plus en plus en Europe – sont suivis avec attention.
Lundi, Eurostat a publié les chiffres du chômage européen pour novembre 2021. Ceux-ci font état d'un nouveau recul à 6,5 % dans l’UE et à 7,2 % dans la zone euro. En chiffres absolus, cela correspond à environ 14 millions de chômeurs dans l’UE et 12 millions dans la zone euro. Nous sommes donc revenus – plus rapidement que prévu - à des niveaux proches des planchers historiques qui prévalaient avant la crise du Covid-19. En outre, la baisse ne concerne pas uniquement le nombre de chômeurs, mais aussi le nombre d’heures prestées, qui a pratiquement renoué avec son niveau d'avant la pandémie. Le marché de l’emploi européen semble donc s'être presque totalement remis de la crise.
Pénurie sur les marchés du travail européens
L'explosion tant redoutée du chômage n’a donc pas eu lieu. Au contraire, la reprise économique vigoureuse et l'évolution des préférences (de travail) et de la démographie sont à l’origine d’une pénurie sur les marchés du travail européens. En outre, les entreprises éprouvent de plus en plus de difficultés à pourvoir leurs postes vacants en raison du déséquilibre entre l’offre et la demande. Le taux de postes vacants se situe à son niveau le plus élevé en plus de 10 ans. Cette combinaison entre taux de chômage faible et taux de postes vacants élevé (à son plus haut) est inédite. Sur la courbe de Beveridge, l'Europe se trouve à son niveau le plus élevé depuis plus de dix ans (voir le graphique). Outre des marchés du travail très serrés, cela promet également pour les négociations salariales à venir, notamment en Allemagne.