Fin de campagne au Royaume-Uni
La course touche à sa fin. Après presque deux mois de campagne et six tours de vote, Boris Johnson remettra les clés du 10 Downing Street à son successeur le 5 septembre. Les deux derniers candidats en lice sont Rishi Sunak, l’ancien ministre des Finances, et Liz Truss, l’ancienne ministre des Affaires étrangères. 160 000 militants du parti conservateur s'apprêtent à donner leur verdict final.
Agenda économique difficile
Le nouveau Premier ministre ou la nouvelle Première ministre sera confronté/e à une économie fragile. Le Royaume-Uni affiche depuis des années une faible croissance de la productivité. Dans les années 2010, la productivité du travail n’a progressé que de 0,7 % par an. Au sein du G7, seule l’Italie a connu un rythme plus lent. Cette faible croissance de la productivité a eu un impact important sur la croissance du PIB. Depuis 2010, le PIB par habitant n’a augmenté que de 9 %, soit moins que dans l’UE et aux États-Unis (voir graphique). Et leBrexit n'a fait qu'aggraver encore les choses. En 2021, les exportations du Royaume-Uni ont chuté de 16 % par rapport à 2019, à cause des droits d’importation et des contrôles douaniers. Ces taxes à l’importation provoquent en outre une pression haussière sur les prix. L’inflation a ainsi atteint 10,1 % en juillet, un niveau supérieur à celui observé aux États-Unis et dans la zone euro. L’inflation de base s’est quant à elle établie à 6,1 %, soit largement au-dessus de l’objectif de 2 % fixé par la banque centrale britannique.
Deux choix très différents
Les deux candidats ont beau venir du même parti, ils ont deux visions très différentes de l'économie. Rishi Sunak est conservateur sur le plan fiscal et ne veut plus que le déficit public augmente tant que l’inflation ne sera pas sous contrôle. Il ne supprimerait que temporairement la TVA de 5 % sur les factures d’énergie et ne soutiendrait que les ménages les plus pauvres. Liz Truss, actuellement en tête dans les sondages, est moins préoccupée par le déficit budgétaire et veut surtout alléger la pression fiscale. Elle veut ainsi réduire considérablement l’impôt sur les revenus et l’impôt des sociétés. Elle veut également supprimer les taxes vertes sur la facture énergétique (153 £ par ménage en moyenne) et augmenter les dépenses de défense de près de 1 % du PIB. Le coût total de ses promesses est estimé à 1,8 % du PIB. Les deux candidats sont en revanche sur la même longueur d’onde en ce qui concerne la relation avec l’UE. Ils soutiennent tous deux le protocole nord-irlandais actuel, ce qui réduit sensiblement le risque d’un Brexit dur.
Un revivement dans les sondages ?
Celui ou celle qui l'emportera aura peu de temps pour faire ses preuves. Les prochaines élections législatives sont prévues dans moins de 3 ans, en janvier 2025. Après 12 années de gouvernement conservateur, les Britanniques semblent avoir envie de changement. Dans les sondages actuels, le parti conservateur n’obtient en moyenne que 31 % des voix, soit 10 % de moins que son grand rival travailliste. Si le nouveau Premier ministre/la nouvelle Première ministre ne renverse pas la tendance économique rapidement, le 10 Downing Street risque d'accueillir un nouveau locataire en 2025 !
Laurent Convent, Economist KBC Group