Le FMI et la Banque mondiale craignent un problème d'endettement

La fine fleur du monde financier se réunit chaque année en octobre lors des réunions organisées par le Fonds Monétaire International (FMI) et la Banque Mondiale. Pour assurer le suivi et la préparation de ces « Annual Meetings », les principaux comités des deux instituts se rencontrent déjà une fois auparavant. Cette mise à jour intermédiaire aura lieu la semaine prochaine et mérite plus d’attention que d’habitude vu la crise économique et sanitaire actuelle.
À l’approche de la réunion, quelques grosses pointures ont donné la couleur sans nuance : le thème est l’imminence de la crise de la dette dans les pays émergents. Hier, la directrice générale du FMI, Kristalina Georgieva, a mis le doigt sur le problème : la hausse des taux dans les pays clés, et plus précisément aux États-Unis, rend l’alternative sans risque plus attrayante par rapport à l’investissement dans les pays émergents. De cette manière, il y a un risque de fuite des capitaux. Hier, le taux américain à 10 ans a atteint un nouveau sommet cyclique au-dessus de 1,75%, son niveau le plus élevé depuis janvier 2020. Notre vision à long terme d’une hausse des taux d’intérêt et d’une courbe encore plus raide est désormais connue. La pression sur les pays à revenus moyens ou faibles peut s’intensifier étant donné qu’ils ont également eu recours à des incitants fiscaux l'année dernière, avec pour conséquence des ratios d’endettement plus élevés. En outre, ces pays dépendent souvent du secteur touristique qui, en raison de la nature de la crise, est paralysé.
Traditionnellement, le problème de la dette dans ces pays émergents est amplifié parce que les dettes ont été contractées dans des devises étrangères plus chères (principalement le dollar). Un atout pour attirer les investisseurs, mais une pierre d’achoppement si la devise locale s’effondre pendant une crise. Le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, a déclaré plus tôt cette semaine que de nombreux pays qui ont décroché de la dette extérieure ces dernières années sont actuellement confrontés à un autre problème. La durée moyenne de l’encours de la dette intérieure a très rapidement chuté pendant la crise du Covid. Dans un pays comme le Brésil, elle n’était que de deux ans en 2020. Un avantage pour réduire le coût de l’aide fiscale, mais un sérieux danger si les ressortissants ne peuvent ou ne veulent plus faire tourner ce cycle de financement à court terme. L’année dernière, peu de pays ont failli à leurs obligations de paiement, ce qui donne un faux sentiment de sécurité selon Guterres. La problématique de la dette est trop facilement négligée.
Georgieva propose un plan par étapes pour aider les pays à bas et moyens revenus à traverser la crise. À court terme, le soutien fiscal et la campagne de vaccination priment. Dans une deuxième phase, il faut travailler sur les finances publiques. Ici, G&G, soutenus par le G7, œuvrent en faveur d'une augmentation des droits de tirage spéciaux du FMI (SDR) de 650 milliards de dollars. Grâce à cette injection de capital, le FMI peut prévoir des réserves supplémentaires en cas de besoin. L’augmentation précédente du SDR (250 milliards de dollars) a eu lieu dans le sillage de la crise financière de 2008-2009. Un tampon plus large du FMI pourrait donner plus de marge de manœuvre aux pays en détresse pendant leur exercice d’assainissement. Le troisième pilier de Georgieva est (très) prématuré : des investissements plus verts et plus numériques pour doper la prospérité à long terme.
Mathias Van der Jeugt, salle des marchés KBC