Thème de la reflation temporairement relégué au second plan
L'euro n’a pas été au meilleur de sa forme cette semaine. Le cours EUR/USD est retombé de 1,1950 à moins de 1,18, son niveau le plus bas depuis novembre de l’année passée, prenant ainsi la direction d'un support technique crucial dans la zone basse de 1,16. Le cours EUR/GBP a, pendant quatre séances, tenté de s’éloigner de son plus bas de l’année (autour de 0,8540), mais la vigueur de la livre sterling a brutalement mis fin à ces tentatives hier. En cas de rupture à la baisse, l'écart évoluera en direction d'un niveau de support dans la zone haute de 0,82.
L'euro a tremblé malgré la détente temporaire sur le marché des taux. La semaine dernière, ce contexte était plutôt favorable à la monnaie unique européenne. Cette semaine, le thème dominant de la reflation a cédé la place au nouveau malaise lié au Covid. Les gouvernements sont passés d’un programme ambitieux de retour à la liberté à une prolongation du confinement. Les conséquences économiques se laissent deviner. Les corrélations relatives au sentiment vis-à-vis du risque ont remplacé les corrélations relatives à la reflation. La correction boursière a pesé sur le marché des taux et a affecté l’euro. Les routes de l'Europe se sont éloignées de celles du Royaume-Uni ou des États-Unis. Le parlement britannique a entériné la trajectoire de déconfinement proposée par le premier ministre Johnson. Les premiers assouplissements entreront en vigueur dès lundi et le début d'un vrai retour à la normale est prévu pour, au plus tôt, le 21 juin. Aux États-Unis, le président Biden a doublé son objectif de nombre d’Américains vaccinés au cours de ses 100 premiers jours de mandat, à 2 millions par jour.
Malgré cet intermède Covid, nous pensons que ce n'est qu’une question de temps avant que le thème de la reflation ne reprenne sa place au premier plan. La faiblesse de la demande pour les obligations d’État américaines à 7 ans est pratiquement passée inaperçue hier. Elle n'est pourtant pas bon signe. Aux niveaux actuels des taux d’intérêt, les investisseurs montrent qu'ils ne sont pas encore prêts à financer les gigantesques déficits américains. Dans deux semaines, le Trésor viendra avec des obligations affichant des échéances encore plus longues. Un manque d'intérêt pourrait à nouveau entraîner une hausse des taux et un raidissement de la courbe.
La volatilité sur le marché pétrolier ne se répercute pour l’instant pas sur d’autres marchés. L'or noir était en chute libre à cause du choc négatif provoqué sur la demande par le covid (de 70 dollars à 60 dollars le baril) jusqu’à ce qu’un gigantesque tanker ne vienne se mettre en travers du très fréquenté canal Suez. Pas moins de 10 % de la production de pétrole passe par ce canal. Les chaînes de production déjà perturbées se retrouvent donc encore davantage sous pression et le cours l'or noir profite pour le moment de ce choc temporaire sur l’offre. Le baril de Brent s'échange actuellement autour de 63 dollars. À plus long terme, nous nous attendons toujours à une hausse des prix pétroliers en raison de la reprise économique prévue au second semestre.
Mathias Van der Jeugt, salle des marchés KBC