Le redémarrage n’est pas irréversible

Les marchés

Pendant des mois, de nombreux virologues, épidémiologistes et autres experts (autoproclamés ou non) ont monopolisé les gros titres ad nauseam. Ils représentent généralement le camp le plus prudent: mieux vaut un confinement prolongé et approfondi qu’une normalisation rapide qui limiterait les dégâts économiques à court terme. L’un des arguments invoqués est notamment le risque d’une deuxième vague, qui fait planer le spectre d’une réinstauration des mesures de quarantaine. Les mauvaises langues diront que ce catastrophisme est leur pain quotidien. Mais les dernières nouvelles indiquent que ce scénario tant redouté ne peut pas être exclu trop vite. Le redémarrage n’est pas irréversible.

Nous pouvons commencer par prendre la température outre-Atlantique, au propre comme au figuré. De fait, plusieurs états des États-Unis signalent une nouvelle hausse, voire des records au niveau du nombre d’infections répertoriées chaque jour. Le Texas, l’Arizona, la Floride et d’autres états dans le sud et l’ouest du pays ont été parmi les premiers à assouplir les mesures strictes qui avaient été imposées: cela pourrait indiquer que cette hausse n’est pas seulement due à l’augmentation du nombre de tests effectués. Il faut aussi tenir compte du nombre de tests positifs par rapport au total; or cette proportion est à la hausse dans les trois états susmentionnés. En Arizona, l’état où l’augmentation est la plus prononcée, la courbe ascendante a commencé dans les 10 à 14 jours après la levée du confinement. Cela correspond plus ou moins à la période d’incubation. Actuellement, un nouveau confinement à l’échelle nationale ne semble pas à l’ordre du jour. Cependant, certaines entreprises prennent le gouvernement (local) de vitesse. Par exemple, un mois à peine après la réouverture, le géant de la technologie Apple a de nouveau fermé plusieurs de ses magasins dans les états les plus touchés. Les navires de croisière ne pourront pas accoster dans les ports américains avant mi-septembre. Initialement, la plus grande compagnie de croisière au monde allait pourtant reprendre ses activités aux États-Unis à partir du mois d’août.

Et en Europe? L’Allemagne est aussi aux prises avec de nouveaux foyers de coronavirus, qui restent pour l’heure localisés. Le foyer le plus récent a été tracé dans un abattoir d’une commune de l’état de Rhénanie-du-Nord-Westphalie. Plus de 1 300 personnes ont été contaminées. Là encore, il n’y a pas de confinement (régional) en vue pour l’instant. Cependant, l’entreprise concernée a fermé ses portes et via l’app de traçage, l’Allemagne s’efforce d’enrayer au maximum l’effet domino. Ce n’est pas gagné d’avance: hier, le taux de reproduction est monté à 2,88, quand un taux supérieur à 1 indique une propagation exponentielle. En outre, les nombreux travailleurs étrangers risquent de propager le virus au-delà des frontières allemandes. Ils ne sont pas toujours officiellement enregistrés, ce qui ne facilite pas les contacts.

En somme, le coronavirus est tout sauf mort et enterré. Nous savons déjà que l’escalade peut être très rapide. Une fois de plus, la réaction des marchés est d’autant plus surprenante: ce matin, les bourses européennes ont connu des pertes d’environ 1,5% à l’ouverture, mais se sont rattrapées depuis. Le cours EUR/USD s’est rétabli au-dessus de 1,12 et les marchés des taux font du surplace. Le marché semble croire dur comme fer à l’efficacité des technologies de traçage, à la promesse d’un vaccin ou d’un médicament et à la puissance de l’arsenal fiscal et monétaire. Jusqu’à présent, les deux premières solutions se font plutôt attendre. Il reste à espérer qu’une conclusion positive suivra bientôt. Sinon, vu leur positionnement actuellement très unilatéral, les marchés risquent de subir un contrecoup aussi rapide que violent.

L’EuroStoxx50 a épongé ses pertes. La confiance des marchés reste particulièrement élevée.

Bron: Bloomberg

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