Banques centrales: hier, aujourd'hui et demain
Aujourd'hui, nous avons une pensée pour Paul Volcker. Ce modèle de constance s'est éteint hier à l'âge de 92 ans. À la tête de la Fed entre 1979 et 1987, Volcker avait dû combattre une inflation galopante, qui avait même grimpé jusqu'à environ 12% sous son prédécesseur. Particulièrement critique vis-à-vis de la politique inefficace menée par la Fed, Volcker était partisan de mesures plus drastiques. Une fois en place, il avait donc administré une thérapie de choc à l'économie américaine. Résultat: des taux très élevés, des prix et une consommation sous pression et un pic du chômage qui ont poussé l'économie américaine dans deux récessions consécutives. Malgré les nombreuse critiques, le président de la Fed avait maintenu son cap. Comme l'a écrit Jean-Baptiste Rousseau, la constance est en effet "le seul remède aux obstacles du sort jaloux". Et Volcker a fini par arriver à ses fins. Grâce à sa persévérance, le banquier central était parvenu à enrayer l'inflation et à jeter les bases d'une économie florissante et durable, qui durera pendant près de 15 ans, jusqu'à l'explosion de la bulle internet (1997-2000).
Retour au présent
L'inflation est actuellement dans la situation inverse. De nombreuses banques centrales tentent en effet aujourd'hui de la relancer, après avoir mis en œuvre des mesures d'assouplissement quantitatif. La Fed américaine doit actuellement se satisfaire d'une inflation de 1,8% (en glissement annuel), alors que la Banque centrale européenne doit se contenter d'un maigre taux de 1% (en glissement annuel). Les nombreuses baisses de taux et l'ambitieux programme d'assouplissement quantitatif n'ont pas permis de faire grimper l'inflation au niveau souhaité de 2%. Nous sommes donc curieux de voir ce que vont nous réserver les deux banques centrales lors de leurs réunions de cette semaine.
La Fed américaine se réunit demain. Après trois baisses de taux, la banque centrale a décidé de débrancher le pilote automatique. Son président, Jerome Powell, a indiqué que les trois derniers assouplissements devraient avoir donné suffisamment d'oxygène à l'économie américaine pour résister aux pressions. Les solides données économiques publiées récemment apportent de l'eau au moulin de la Fed et de sa position attentiste. La décision qui sera annoncée demain sera accompagnée par les nouvelles prévisions de la banque en matière de croissance et d'inflation (ce que l'on appelle les "dots"). Les marchés ne s'attendent à aucune surprise de ce côté-là. Les investisseurs tablent sur un statu quo des taux demain (97%) et en 2020. Reste à voir si la Fed divulguera de nouveaux éléments à propos de la révision de sa politique en 2020.
Jeudi, ce sera au tour de la BCE de se réunir. Il s'agira de la première réunion présidée par Christine Lagarde depuis son entrée en fonction au mois de novembre. Lagarde ne va probablement pas toucher aux paramètres de la politique monétaire. Nous serons en revanche attentifs à la manière avec laquelle elle va mener sa première conférence de presse et aux touches personnelles qu'elle apportera (une politique plus verte, par exemple). Lors de la conférence de presse, la nouvelle présidente de la BCE va vraisemblablement être assaillie de questions à propos de l'évaluation de la stratégie qu'elle a annoncée. Cette semaine, Lagarde a expliqué devant le Parlement européen que la banque centrale pourrait ajuster ses achats d'obligations dans le cadre de la lutte contre le changement climatique. Par ailleurs, la BCE pourrait aussi réexaminer son objectif d'inflation "inférieur, mais proche de 2%".
Youssra El Nasire, salle des marchés KBC