Toujours peu de soutien des taux pour le zloty
Hier, la banque centrale polonaise (NBP) a elle aussi laissé sa politique inchangée à 1,5%. Ce qui n'était absolument pas une surprise. Ce n'est cependant pas parce que nous connaissons désormais bien le mécanisme de réaction de la NBP que sa décision est nécessairement évidente. La banque NBP s'est depuis longtemps ralliée au groupe des banquiers centraux qui préfèrent maintenir une politique (beaucoup) trop souple plutôt que de commettre l'erreur d'un resserrement inutile.
L'histoire de la banque centrale polonaise n'est d'ailleurs pas tellement éloignée des constats que font de nombreux collègues. Oui, l'économie intérieure se porte (très) bien, mais les tensions commerciales et le ralentissement international de la croissance constituent une source d'incertitude. En Pologne, qualifier la croissance économique de 'forte' est un euphémisme. Au premier trimestre, les activités ont progressé de 1,5% en glissement trimestriel et de 4,7% en glissement annuel. Pour cette année, la NBP a revu ses perspectives de croissance à la hausse pour les porter à 4,5%. Et pour 2020 aussi, elle prévoit une croissance plus que solide, qui devrait s'établir juste en dessous des 4,0%. Ce n'est toutefois pas une raison pour se départir de la politique ultra-incitative.
En matière d'inflation, la NBP a fixé son objectif à 2,5% (+/-1,0%). En raison de facteurs techniques, elle avoisine actuellement l'objectif de la NBP (taux général à 2,6% en juin, taux core à 1,7% en glissement annuel en mai). La NBP s'attend toutefois à ce que cette inflation puisse s'établir à un niveau considérablement plus élevé en 2020 et 2021, dans la fourchette des 1,5 à 3,5%. Une fois de plus, ceci n'est pas une raison pour préparer le marché à un éventuel relèvement des taux d'intérêt.
Le gouverneur Adam Glapinski est de longue date en faveur d'une politique extrêmement souple qui permette d'aider le gouvernement à réaliser ses ambitions de croissance. Il annonce depuis quelque temps déjà que les taux ne changeront probablement pas pendant son mandat, qui se terminera en 2022. Il en a même remis une couche hier en déclarant qu'il ne serait pas surpris que le prochain changement au niveau des taux soit un abaissement plutôt qu'un relèvement! Il a cependant admis que c'est un avis que ne partagent pas tous les membres du comité de politique.
Après une période d'inertie, le zloty polonais avait récemment repris quelques couleurs. Il s'est apprécié d'un cours EUR/PLN de 4,30 à moins de 4,25 aujourd'hui. Cette évolution reflète néanmoins avant tout la faiblesse relative de l'euro, due au probable nouvel assouplissement de la politique de la BCE, plutôt que la force du zloty. Si le renforcement (+/- 1,0%!) était très limité, Glapinski n'en a pas moins estimé qu'une petite explication s'imposait. Il a conclu que le renforcement du PLN a le même effet qu'un relèvement des taux d'intérêt, même si ce n'est pas la NBP qui en est à la manœuvre. Les déclarations de Glapinski illustrent bien qu'il en faudrait beaucoup pour décider de procéder à un relèvement des taux d'intérêt, même dans un contexte où l'inflation et la croissance le justifierait. À court terme, le zloty peut encore s'apprécier davantage par rapport à l'euro, si le marché obtient des éléments concrets pointant un assouplissement dans le chef de la BCE. Mais cette évolution ne mènera probablement pas très loin. Plus le zloty sera fort, plus la probabilité d'un éventuel relèvement des taux polonais sera faible. Si cette évolution va trop loin au goût de la majorité des membres de la NBP, il n'est même pas exclu qu'encore plus de membres envisageront un abaissement des taux. Dans ce contexte, un nouveau renforcement du zloty risquerait bien de se transformer en une sorte de 'prophétie autodestructrice'. Des cours EUR/PLN sous les 4,20 sont dans ces circonstances loin d'être garantis.