L’incertitude internationale entraîne une nouvelle réduction des perspectives de croissance de l’économie belge

Opinion économique

L’incertitude internationale croissante et le risque accru d’un brexit disruptif pèsent sur l’économie belge. Le ralentissement de 2018 devrait se poursuivre cette année et l’année prochaine. De plus en plus d’indicateurs indiquent un ralentissement accéléré de l’économie belge. En raison de la faiblesse des indicateurs dans l’industrie manufacturière et du ralentissement de la croissance chez nos principaux partenaires commerciaux, KBC abaisse les perspectives de croissance économique pour la Belgique en 2019 et 2020 à 1,2% et 1,1% respectivement, bien en dessous des attentes des autres analystes. Le marché du travail belge donne des signes encourageants. La création continue d’emplois et la croissance des revenus soutiennent la consommation intérieure, mais génèrent en même temps une forte croissance des importations qui pèse également sur les chiffres de la croissance réelle. En outre, dans un environnement international défavorable, la hausse des coûts salariaux risque d’affaiblir une nouvelle fois la compétitivité internationale de la Belgique.

Le climat se détériore dans la zone euro...

Différents indicateurs de confiance montrent que l’économie de la zone euro continue de ralentir. Par conséquent, nous prévoyons que la croissance économique décevra au quatrième trimestre de 2018. Les récents chiffres de croissance de l’économie allemande pour l’ensemble de l’année 2018 confirment cette prévision. Le début de 2019 sera également faible. La confiance des chefs d’entreprise dans toute l’Europe continue de baisser, même pour le sixième mois consécutif dans l’industrie manufacturière. Dans un certain nombre d’économies, dont la France et l’Italie, un ralentissement significatif de la croissance semble inévitable. Les données brutes se détériorent également, comme en témoigne la baisse remarquable de la production industrielle en novembre 2018 dans les quatre plus grandes économies (Allemagne, France, Italie et Espagne). La confiance des consommateurs s’est également affaiblie dans la zone euro en décembre, bien qu’elle reste nettement plus forte que celle des entreprises. Elle est encore clairement soutenue par la création continue de nouveaux emplois et l’augmentation des salaires.

Les chiffres plus faibles s’inscrivent dans le contexte d’un environnement international moins favorable. Le commerce international en particulier est sous pression. L’incertitude au sujet de la guerre commerciale américano-chinoise persiste. Ce conflit bilatéral conduit aujourd’hui effectivement à un affaiblissement du commerce mondial. En outre, une escalade de la guerre commerciale internationale vers l’Europe reste possible. L’absence d’accord entre le Royaume-Uni et l’UE27 sur un régime de Brexit ordonné ajoute également à cette incertitude. Pendant ce temps, les gouvernements et les entreprises se préparent à un “no-deal Brexit” qui perturbe effectivement l’économie européenne. Au sein de la zone euro, la protestation des “gilets jaunes“ en France pèse désormais également sur la confiance et la croissance, sans perspective de sortie rapide. Les troubles sociaux se propagent également au niveau européen. Entre-temps, l’Italie continue de faire face à des défis structurels. Le gouvernement italien est parvenu à un accord avec la Commission européenne sur le déficit budgétaire en 2019, mais cela n’empêche pas que la question réapparaisse plus tard cette année. En outre, la croissance économique dans l’UE, en particulier en Allemagne, souffre de facteurs temporaires dans l’industrie automobile depuis septembre. Bien qu’en voie d’extinction, ils ont encore pesé sur la croissance au dernier trimestre 2018.

Ces incertitudes persisteront dans les mois à venir. Une nouvelle détérioration de la confiance des producteurs et des consommateurs est très probable. Le vent défavorable en provenance de diverses directions réduit légèrement nos prévisions de croissance, déjà prudentes, pour la zone euro en 2019, à 1,5%. Ces performances de croissance restent bonnes et en ligne avec le potentiel de croissance. Le chômage est à son plus bas niveau depuis la crise financière et continue de baisser. Le resserrement du marché du travail entraînera une hausse des salaires, ce qui favorisera à son tour la consommation.

...La Belgique suit

En ligne avec le ralentissement de la production de l’industrie allemande, les chiffres de l’industrie manufacturière belge à la fin de 2018 sont également décevants. L’affaiblissement de l’activité industrielle en Belgique n’est pas nouveau et se produit en fait depuis la mi-2017. La tendance à la baisse de la production a même été légèrement plus forte en Belgique qu’en Allemagne.

Figure 1 - Production industrielle (hors construction, volume, variation annuelle en %, glissement sur 3 mois)

Source : BNB.Stat ; Statistiches Bundesamt Deutschland.

D’autres indicateurs récents montrent également une image faible. Les entreprises s’attendent donc à un nouveau retard dans leurs commandes à l’exportation. La volonté d’investir n’a pas non plus atteint son apogée. Le plus frappant est la forte baisse de la confiance des consommateurs, à son plus bas niveau sur ces deux dernières années. Dans une moindre mesure, on craint également de plus en plus que le chômage n’augmente. L’ajustement à la baisse de nos perspectives de croissance pour la zone euro nous a également conduits à revoir à la baisse les prévisions de croissance de l’économie belge en 2019. Plus précisément, nous constatons que ce taux est inférieur de 0,2 point de pourcentage à l’estimation de décembre. Cela signifie que nous tablons maintenant sur une croissance du PIB réel en Belgique de 1,2% en 2019 et de 1,1% en 2020. Ces chiffres sont inférieurs aux prévisions de croissance publiées par la Banque nationale de Belgique à la mi-décembre (respectivement 1,4% et 1,2%). Si le scénario de KBC se concrétisait, cela signifierait que la croissance du PIB serait inférieure au taux de croissance potentiel de l’économie belge cette année et l’année prochaine. Cette croissance potentielle est estimée par la Commission européenne à 1,3%.

Un marché du travail fort, du bon et du moins bon pour la croissance

La tendance à la baisse de la croissance du PIB belge est principalement due à la détérioration du climat économique international. Cela affaiblira la croissance des exportations. La demande intérieure, en revanche, continuera de soutenir la croissance belge. La dynamique de la consommation des ménages ne devrait pas être aussi mauvaise au cours des prochains trimestres que les derniers chiffres de confiance des consommateurs le suggèrent, au contraire. Dans la pratique, toutefois, il n’existe pas de corrélation aussi étroite entre la croissance de la consommation et l’évolution de la confiance des consommateurs. Il est plus important d’examiner les déterminants “durs“ de la consommation, en particulier l’évolution du pouvoir d’achat des ménages belges. Le revenu réel disponible des ménages augmentera même assez sensiblement en 2019, d’environ 2,2%, grâce à plusieurs facteurs. Premièrement, la croissance de l’emploi devrait se poursuivre en 2019, mais à un rythme légèrement inférieur. Deuxièmement, la croissance des salaires s’accélère, en partie en raison des tensions persistantes sur le marché du travail. Troisièmement, le tax shift stimulera également la croissance des revenus en 2019. Enfin, la croissance du revenu réel est également soutenue par une inflation plus faible en raison de la baisse des prix de l’énergie. Nous prévoyons que l’inflation belge atteindra 1,8% en 2019, contre environ 2,4% en 2018.Cependant, il y a aussi un pendant négatif à ces bénéfices. Dans une petite économie ouverte comme la Belgique, une forte demande de consommation entraîne une augmentation des importations. L’augmentation prévue de la croissance des importations, conjuguée au ralentissement prévu de la croissance des exportations, est responsable d’une baisse des exportations nettes. Dans notre scénario, les exportations nettes réduiront de 0,2 et 0,4 point de pourcentage de la croissance du PIB en 2019 et 2020 respectivement.

Avec une croissance potentielle de seulement 1,3% et une croissance effective du PIB légèrement inférieure à celle-ci en 2019, la Belgique affiche des résultats inférieurs à ceux de la zone euro. Cela indique que les défis pour l’économie belge restent importants. En tant que petite économie ouverte, nous ne pouvons pas faire grand-chose pour changer les conditions mondiales, mais grâce aux réformes nécessaires, nous pouvons créer un environnement dans lequel l’investissement structurel renforce notre économie. Il reste encore beaucoup de travail à faire dans ce domaine.

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