Euro: regain d’espoir

L'évolution du cours EUR/USD ces dernières 24 heures en dit long sur le positionnement et les attentes du marché. Le dollar manifeste de premiers signes de fatigue depuis le milieu du mois dernier. Un pessimisme très marqué vis-à-vis de l’euro avait empêché la chute du cours EUR/USD de se transformer en une correction à la hausse. Depuis hier, le plancher s’est de nouveau renforcé.
L’histoire commence par la publication des taux d’inflation américains pour le mois de janvier. La hausse mensuelle (+0,5%) a été la plus forte depuis août 2023, et supérieure aux attentes du marché (+0,3%). De ce fait, pour la première fois depuis juin dernier, l’inflation générale affiche une hausse en base annuelle jusqu’à 3%. L’inflation de base sous-jacente s’est accélérée, à 0,4% en glissement mensuel et 3,3% en glissement annuel, tandis que l’inflation des services est passée à 0,5% en glissement mensuel et 4,3% en glissement annuel. Mettant un terme abrupt la correction à la baisse du mois dernier, les taux américains rebondissent de plus de 10 points de base sur toute la longueur de la courbe des taux. La Fed a d’ores et déjà convaincu le marché de la nécessité d’une pause, en partie motivée par certaines attentes relatives à la politique domestique. La tension (actuelle) sur les prix est un facteur aggravant, qui repousse les attentes du marché quant à la durée de la pause vers la fin de l’année. Le plancher prévu sur la courbe forward reste autour des 4%. C’est une nuance importante: en effet, ce n’est que lorsque le marché changera d’avis par rapport à la direction du prochain mouvement des taux (à la hausse plutôt qu’à la baisse), au lieu de simplement s’interroger sur la durée de la pause, que le dollar pourra quitter les niveaux actuels. Autrement dit: la barre est placée (très) haut. Dans un premier temps, le cours EUR/USD s’est replié de 1,0380 vers 1,0320, mais ce mouvement s’est rapidement essoufflé et la zone de support de 1,02 est restée hors de portée.
Par la suite, un mouvement haussier opposé s’est manifesté. L’annonce comme quoi le président américain Trump s’était entretenu par téléphone avec le président russe Poutine a suffi à mettre les marchés en joie à propos de la perspective d’un terme au conflit en Ukraine. Les deux chefs d’État se rencontreront prochainement à plusieurs reprises. Pour l’instant, l’Europe est absente de ces négociations et s’en indigne. Pour le marché, c’est secondaire. En première instance, l’espoir domine: espoir de croissance, d’une atténuation de l’incertitude, d’une énergie meilleur marché… Plus la barre est élevée pour le dollar, plus elle est faible pour l’euro. Ce matin, le cours EUR/USD a grimpé à un sommet proche de 1,0440, tandis que les bourses européennes ouvraient en hausse de plus de 1%. Pour la première fois depuis octobre, le forint hongrois vise EUR/HUF 400, tandis que le zloty polonais (EUR/PLN 4,16) se rapproche de son sommet de 4,13 en 2018. Tout cela, après un seul coup de téléphone.
Pour l’instant, l’évolution du cours EUR/USD depuis la publication des taux d’inflation américains d’hier après-midi ne change rien à la situation technique de la paire de devises, mais témoigne surtout du potentiel de l’euro. Outre l’incertitude géopolitique (Ukraine, droits d’importation), des incertitudes politiques (élections allemandes) et monétaires (prévisions de la BCE) maintiennent encore la monnaie unique sous pression. Là encore, les attentes sont (trop) faibles.
Mathias Van der Jeugt, salle des marchés KBC
EUR/USD: l’euro donne de premiers signes de vie
