Le cours EUR/USD en route vers un nouveau sommet annuel

La dynamique commerciale avance de plus en plus au pas d’Echternach: trois pas en avant, deux pas en arrière. La semaine dernière, c’était le cessez-le-feu de 90 jours entre l’Europe et les États-Unis qui était à un cheveu de se rompre. Après ce week-end, l’armistice entre la Chine et les États-Unis est menacée. Les deux parties s’accusent mutuellement de ne pas respecter les conditions négociées à Genève début mai. Le gouvernement américain se plaint que les exportations de minéraux de terres rares ne reprennent que modérément, tandis que la Chine dénonce les mesures restrictives à l’encontre du secteur technologique, ainsi que des actions discriminatoires comme la suspension des procédures de visa pour les étudiants chinois. Le secrétaire au Trésor Bessent espère toujours qu’un coup de téléphone entre les présidents Trump et Xi pourrait désamorcer la situation.
Par ailleurs, lors d’un rallye dans la capitale américaine de l’acier, Pittsburgh, Trump a promis ce week-end de relever les droits de douane sur l’acier de 25% à 50% à partir de mercredi. Cette mesure vise à contribuer à faire en sorte que l’industrie sidérurgique américaine ne souffre finalement pas de l’acquisition prévue de US Steel par l’entreprise japonaise Nippon Steel. Sur les réseaux sociaux, Trump a également envisagé d’augmenter les droits d’importation de l’aluminium. Enfin, la justice américaine a encore compliqué l’affaire des tarifs réciproques: selon un arrêt d’un tribunal de commerce, la base juridique n’est pas valide. Ce jugement a été suspendu à la suite d’une plainte directe du département de la Justice. Il est fort probable que la Cour suprême doive finalement se pencher sur l’affaire.
Ajoutons à cela l’attaque de drones ukrainiens contre des bases aériennes russes et la défaite du candidat pro-européen à l’élection présidentielle polonaise, et il est facile de comprendre pourquoi le marché manifeste une certaine frilosité ce matin. Les bourses européennes perdent 0,5%-1%. Sur le marché des changes, le dollar continue à faire les frais des sautes d’humeur de Trump. Le cours EUR/USD flirte avec son sommet de mai à 1,1418. C’est le dernier obstacle technique, fragile, avant un retour au sommet annuel de 1,1573, qui pourrait être rompu cette semaine et sera en tout cas mis à l’épreuve. Outre le chaos commercial, le dollar ne peut guère compter sur les données américaines (indicateurs de confiance ISM, rapports JOLTS et ADP, payrolls…). La semaine dernière, une révision à la baisse de la contribution de la consommation à la croissance au premier trimestre avait déjà mis à nu la vulnérabilité du billet vert. Du côté de l’euro, la réunion de la BCE de jeudi renforcera en principe le plancher sous la monnaie unique et les taux courts européens. Les désaccords croissants au sein de la BCE, à propos de l’impact économique et inflationniste de la guerre commerciale et des plans de relance fiscale, indiquent que le cycle d’assouplissement, en mode pilote automatique depuis septembre dernier, est sur le point de s’arrêter. Pour l’instant, le marché monétaire européen mise toujours sur un retour à un taux directeur stimulant d’environ 1,50%.
Mathias Van der Jeugt, salle des marchés KBC
EUR/USD: prêt à reconquérir le sommet annuel à 1,1573
