La Banque d’Angleterre ne se laisse pas déstabiliser

Depuis août de l’année dernière, la Banque d’Angleterre (BoE) a abaissé son taux directeur de 25 points de base chaque trimestre. Hier, elle a continué sur cette lancée en ramenant le taux à 4,25 %. Le gouverneur Bailey et ses collaborateurs ne se laissent pas déstabiliser par le contexte imprévisible et incertain du marché. Le message reste que la BoE pourrait poursuivre son assouplissement progressif dans les prochains mois. Les marchés britanniques ont capté le signal. Tout comme aux États-Unis et en Europe, les marchés des taux étaient en avance sur la courbe. Le taux à 2 ans britannique a donc grimpé de plus de 10 points de base, rompant ainsi la tendance baissière entamée début avril. Dans le cas du Royaume-Uni, les marchés monétaires ont eu tendance à anticiper des réductions de taux à chaque réunion, plutôt que tous les trois mois, lorsque la BoE dispose de nouvelles projections de croissance et d'inflation. Depuis hier, ils sont de nouveau alignés sur des baisses de taux en août et en novembre. La livre sterling a poursuivi son "comeback" entamé depuis peu, avec un premier test du niveau de support technique de EUR/GBP 0,8474. Une rupture sous ce seuil ramènerait la paire de devises dans son ancienne fourchette latérale comprise entre 0,8223 et 0,8474.
Plusieurs détails ont attiré l’attention. Pour commencer, la décision d'hier n'a pas été prise à l'unanimité. Elle a été soutenue par cinq des neuf membres. Deux ont pour leur part plaidé pour le statu quo et deux autres étaient en faveur d'une baisse plus importante (50 pb). Le procès-verbal montre en outre que, sans l'escalade tarifaire, le débat aurait été plus serré entre les tenants du statu quo et ceux d'un assouplissement. En outre, Bailey s'est dit surpris par les scénarios économiques catastrophistes qui ont circulé au cours de ce dernier mois. La trajectoire de croissance attendue est plus ou moins similaire à celle d’il y a trois mois : un peu mieux à court terme en raison des chiffres actuels plus solides (+0,8 % en glissement annuel au deuxième trimestre 2025 au lieu de +0,3 %), un peu moins bien l’année prochaine en raison de l’impact possible des tensions commerciales (1,3 % en glissement annuel au deuxième trimestre 2026 au lieu de 1,5 %) et plus ou moins la même chose à long terme (1,5 % en glissement annuel au lieu de 1,4 %). Le vice-président, Dave Ramsden, a rejoint son président lors de la conférence de presse. Les projections de croissance tiennent compte d’une très faible croissance des investissements alors que le taux d’épargne des ménages continue d’augmenter. Si l’incertitude commerciale diminue, par exemple grâce à l’accord annoncé entre les États-Unis et le Royaume-Uni, tant les investissements que la consommation pourraient donner un coup de fouet au PIB. Enfin, le rapport de politique contient aussi une analyse de scénarios, principalement axé sur l'incidence de l'inflation. Sans surprise, la trajectoire de l’inflation se trouve 0,3 point de pourcentage en dessous de la trajectoire de référence dans le scénario d’un impact plus négatif sur la croissance et 0,4 point de pourcentage au-dessus dans un scénario plus optimiste. Mais une fois de plus, Bailey et ses collègues ont tenu à nuancer. Personne ne peut dire avec certitude à quoi ressemblera le monde dans trois mois, et encore moins dans un an. C’est pourquoi la BoE estime qu’il vaut mieux adopter une position attentiste et préférer la réaction à l'anticipation. Hier, les banques centrales suédoise et norvégienne nous ont envoyé le même signal. C'est de loin la principale raison pour laquelle nous abordons avec une telle méfiance les attentes actuelles du marché concernant les prochaines réunions de politique de la BCE.
Mathias Van der Jeugt, salle des marchés KBC
Le taux à 2 ans britannique capte le signal de la BoE.
