Un nouveau vent pro-européen souffle sur Varsovie
Les sondages de sortie polonais ouvrent la voie à un gouvernement pro-européen sous la direction de l’ancien Premier ministre et ancien président du Conseil européen, Donald Tusk. Les résultats officiels ne sont attendus que tard ce soir ou tôt demain matin, mais les écarts sont suffisamment importants pour que les acteurs principaux ne les contestent pas. L’issue des élections sera encore renforcée par une participation record. Pas moins de 73% de la population polonaise s’est présentée aux urnes ce week-end, contre 63% en 2019.
Selon les résultats provisoires, le parti PiS (‘Droit et justice’) en place du vice-premier ministre Kaczynski reste le plus grand parti de l’échiquier politique, avec 36,8% des voix (200 sièges). Mais c’est une victoire à la Pyrrhus, car le gouvernement se verrait délogé après huit ans au pouvoir. Son partenaire de coalition préféré, Konfederacja (extrême droite), a obtenu 6,2% et 12 sièges. Ils n’atteindront pas la majorité au parlement polonais de 460 sièges, même si le PiS, en tant que plus grand parti, sera en principe le premier à recevoir un mandat du président Duda pour tenter de former un gouvernement.
Le plus grand parti d’opposition de Tusk, la PO (‘Plate-forme civique’) a actuellement 31,6% des voix, ce qui correspond à 163 sièges. Avec le centre-droit (13%, 55 sièges) et la gauche (8,6%, 30 sièges), c’est largement suffisant (248 sièges) pour une majorité parlementaire. Avant le scrutin, le triumvirat avait déjà annoncé qu’ils uniraient leurs forces pour renvoyer le PiS sur les bancs de l’opposition.
Avec Tusk au pouvoir, un vent nouveau soufflera bientôt sur Varsovie. Les relations avec l’Europe en témoigneront le plus rapidement. Ces dernières années, l’approche du gouvernement avait entraîné le gel des fonds de soutien européens (près de 36 milliards d’euros), suite à des modifications anticonstitutionnelles du pouvoir judiciaire polonais qui mettaient en cause son indépendance. De même, sur le plan de la politique migratoire ou du soutien à l’Ukraine, la Pologne et l’Europe ont été en conflit ces derniers mois.
Ce mois-ci, le zloty polonais a pris de l’avance sur le scénario d’une victoire électorale de Tusk. Le cours EUR/PLN a terminé septembre à 4,6250. De là, le niveau de 4,5350 était déjà en vue à la fin de la semaine dernière. Ce matin, le cours EUR/PLN est de 4,48. D’un point de vue technique, le plancher annuel de 4,40 reste un support solide. Aujourd’hui, les taux swap polonais grimpent de 10 points de base à l’extrémité courte de la courbe et chutent de 10 pb à l’extrémité longue. Deux effets différents jouent: à l’extrémité longue de la courbe, l’assouplissement des taux d’intérêt manifeste surtout une prime de risque de crédit réduite. En cas de victoire électorale pour Kaczynski, des termes comme ‘Polexit’ auraient dominé le discours. Au lieu de cela, une éventuelle adaptation à l’euro se profile (pas au cours de ce mandat). À l’extrémité courte de la courbe, la politique monétaire a un impact. Au sein de la Banque centrale de Pologne (NBP), les fidèles du PiS ont volontiers soutenu la politique de soutien à la croissance du gouvernement avec une approche monétaire souple, malgré une inflation élevée. Le marché s’attend maintenant à plus de neutralité.
Mathias Van der Jeugt, salle des marchés KBC