Pause (provisoire ?) de la RBA
La banque centrale australienne (RBA) a maintenu son taux directeur inchangé ce matin. Il s’agit de la première pause depuis le début du cycle de resserrement il y a 11 mois. Sur les 10 dernières réunions de la banque, le taux est de 0,1 % à 3,6 % à l'heure actuelle. Dans sa déclaration de politique, la RBA explique qu'elle veut surtout prendre le temps pour mieux évaluer la situation. Mais l'idée est que les taux directeurs vont continuer d'augmenter. Reste à savoir à quelle vitesse et dans quelle mesure.
Le gouverneur Lowe et ses collègues ont à plusieurs reprises souligné que le taux directeur avait été relevé très rapidement. Et comme les effets des resserrements monétaires sur la croissance et l’inflation ne se font ressentir qu'avec un certain retard, la banque a décidé de marquer un temps d'arrêt pour voir comment la situation évolue. Les récentes craintes autour de la stabilité financière et le regain de volatilité et d’incertitude qui en a découlé offrent également une bonne excuse pour appuyer sur le bouton pause. La croissance australienne ralentit et restera en dessous de sa tendance naturelle au cours des prochains trimestres. La consommation des ménages constitue la variable cruciale. La hausse des taux d’intérêt, la pression sur le pouvoir d’achat et le recul des prix de l’immobilier mettent certains ménages dans les difficultés. En revanche, les niveaux d’épargne restent solides et le marché de l’emploi est toujours très tendu. Le taux de chômage (3,5 %) se situe à son niveau le plus bas en plus de 50 ans. Les salaires sont orientés à la hausse et la RBA est bien consciente du risque d’une spirale salaires-prix vertueuse. L’inflation australienne a probablement atteint son pic plus tôt cette année, vu que l’inflation des marchandises continue de ralentir. En revanche, les prix dans le secteur des services subissent une pression constante et les loyers sont en forte hausse. Les prix des services aux collectivités montent également. Dans ces conditions, la RBA s’atten à ce que l’inflation dépasse l’objectif de 2-3 % au moins jusqu’à la mi-2025. La balance continue par conséquent de pencher en direction des risques de hausse de l'inflation et de resserrements supplémentaires.
Le marché monétaire australien anticipe un autre scénario dans lequel le taux directeur n'ira pas plus haut que 3,6 % et devrait avoir été ramené à 3,4 % d’ici la fin de l’année. Le marché suit la même logique que celle qui a provoqué la forte correction des taux depuis la chute de la Silicon Valley Bank américaine et du Credit Suisse, laissant ainsi entendre que le processus de normalisation des banques centrales est dans l'ensemble (presque) terminé. Le marché des taux australien retombe ainsi dans le même réflexe que ces 15 dernières années, qui consiste à miser sur un assouplissement agressif visant à éviter un effondrement de la croissance. Ce matin, le dollar australien a perdu du terrain par rapport à son pendant américain. Le cours AUD/USD n’est pas parvenu à franchir le cap de 0,68. Le billet vert n'est pourtant pas au mieux de sa forme. Le climat de risque modéré et la faiblesse de l’ISM de l’industrie manufacturière (hier) pèsent à nouveau sur le dollar US. Les investisseurs redoublent de prudence en attendant la publication de l’ISM des services, du rapport ADP sur secteur de l'emploi privé non agricole et des payrolls plus tard cette semaine. Ce matin, le cours EUR/USD a déjà testé un niveau de résistance autour de 1,0930, le dernier seuil avant le plafond de l'année de 1,1033. À 1,62, le cours EUR/AUD est proche de ses plus hauts de l’année. Le prochain niveau de résistance (sommet de 2021) se situe à 1,6437.
Mathias Van der Jeugt, salle des marchés KBC