Les anticipations inflationnistes plafonnent, mais…

Les marchés


Vendredi, les craintes sont devenues réalité: l’inflation UEM pour septembre a clôturé le mois à 1,2% en glissement mensuel, dépassant ainsi les 10,0% en glissement annuel. L’inflation de base a également grimpé plus fort que prévu, de 4,3% à 4,8% en glissement annuel. Des nouvelles du même ordre nous sont parvenues des États-Unis. Le “PCE deflator”, un indicateur que la Fed surveille de près, a progressé plus que prévu en août (inflation de base de 4,9% en glissement annuel, inflation générale de 6,2% en glissement annuel). Mais on s’habitue à tout. Les marchés européens surtout sont restés relativement stoïques et après la hausse spectaculaire de ces dernières semaines, les taux européens ont même subi une légère correction (à 7 pb sur 5 ans).

Comme toujours sur les marchés, la question est de savoir ce qui est déjà pris en compte, en matière d’inflation aussi. Et l’expérience nous apprend qu’à cet égard, il est bon de prévoir une marge d’erreur solide… C’est toujours un peu facile a posteriori, mais revenons-en brièvement aux prévisions d’inflation de la BCE et aux attentes des marchés (voir le graphique des swaps d’inflation). En décembre 2019, avant le coronavirus, la BCE tablait sur une inflation moyenne de 1,6% pour 2022. En septembre 2020, en pleine crise du coronavirus, elle a même revu ce pourcentage à 1,3%. La conduite à tenir coulait de source: des injections monétaires (et fiscales) agressives. À la fin de l’année dernière encore, la BCE escomptait qu’après un bref rebond pour l’année (3,2% en moyenne), l’inflation aurait tôt fait de retomber sous la barre des 2,0% en 2023 et 2024. Soulignons que cette erreur d’appréciation était en grande partie collective. Tournés vers l’avenir, les marchés n’ont pas tout de suite vu le danger. Fin 2019, le swap d’inflation à 10 ans (en vert sur le graphique) cotait aux alentours de 1,15%. En septembre 2020, il est même tombé sous la barre de 1,0%. C’est à la fin de l’année dernière que le marché et la BCE ont commencé à diverger, les prévisions du marché à 10 ans ayant alors franchi le cap des 2,0%. Le marché a vite compris que bien que l’invasion russe serait néfaste pour la croissance, cela ne rendrait pas le choc déflationniste, au contraire. En mai, les attentes à 10 ans ont atteint les 3%. Logiquement, les durées plus courtes ont grimpé beaucoup plus haut.

À première vue, les actions de la BCE (et de la Fed, et de bien d’autres banques centrales) n’ont pas encore donné beaucoup de résultats. Cependant, il y a de l’espoir. Depuis le mois de mai, les anticipations inflationnistes financières ont reculé. Cela s’explique en partie par la baisse des cours de l’énergie et des autres matières premières après le pic du deuxième trimestre.
Mais il y a aussi la perspective (ou en tout cas l’espoir) que le resserrement accéléré opéré par la banque centrale provoque une baisse de la demande, qui se traduira “à terme” par une inflation réduite.

Atteindrons-nous bientôt aussi le pic des taux? Ce débat se profile déjà, surtout à propos des taux directeurs des banques centrales. Il deviendra probablement plus pressant lorsque les données relatives à l’activité économique se détérioreront, surtout aux États-Unis. Mais depuis le recul temporaire de cet été, le principal facteur a été la hausse du taux réel, qui a pris de vitesse la baisse des anticipations inflationnistes. Il ne nous semble pas que ce schéma soit appelé à changer radicalement à court terme. Les marchés adoptent de plus en plus la vision selon laquelle le succès de la lutte contre l’inflation exigera davantage de la part des banquiers centraux qu’un taux réel positif limité à court terme. En Europe surtout, le point où le taux directeur de la BCE (taux de dépôt à 0,75% aujourd’hui; le marché tient compte d’un pic de ± 3,0% au milieu de l’année prochaine) s’approche du taux d’inflation (autrement dit: un taux directeur réel nul) n’est pas encore en vue. Dans ce scénario, la pression haussière exercée par le taux réel devrait encore alimenter la tendance haussière des taux.

Swaps d’inflation à 2 ans (bleu), 5 ans (rouge) et 10 ans (vert) dans l’UEM. Taux réel (orange: swap à 10 ans moins prévisions d’inflation).

Bron: Bloomberg

Disclaimer:

Ce document a été préparé par le desk KBC – Economic Markets et n'a pas été rédigé par le département Research.  Le desk est composé de Mathias Van der Jeugt, Peter Wuyts en Mathias Janssens, analysts  à KBC Bank N.V., entreprise réglementée par l'Autorité des marchés et des services financiers (FSMA). Ces recommandations de marché sont le résultat d'une analyse qualitative, dans laquelle il y a place pour l'expérience passée et les évaluations personnelles. Les avis sont basés sur les conditions actuelles du marché et peuvent être modifiés à tout moment. Les contributions les plus importantes proviennent de données accessibles au public, de nouvelles financières, de la politique économique et monétaire et d'analyses techniques actuelles. Le desk desk KBC – Economic Markets a fait des efforts raisonnables pour obtenir ces informations de sources qu'il considère comme fiables, mais le contenu de ce document a été préparé sans faire une analyse substantielle de ces sources. Aucune évaluation n'a été faite pour déterminer si ces informations sont appropriées ou non pour un investisseur particulier. Les avis sont nos avis actuels à la date indiquée sur ce document et peuvent différer des recommandations précédentes en raison de l'évolution des conditions du marché. Les auteurs ne garantissent pas l'exactitude, l'exhaustivité ou la valeur (commerciale ou autre) de ce document. De même, les auteurs ne sont pas responsables envers quiconque reçoit ce résumé de toute perte ou dommage (qu'il s'agisse d'un délit (y compris la négligence), d'une rupture de contrat, d'une violation de la loi ou d'autres obligations) résultant d'un acte ou d'une omission sur la base de ce contenu, ou de toute réclamation contre les auteurs concernant le contenu ou les informations contenues dans ce document. Toutes les opinions exprimées dans le présent document reflètent le jugement au moment de la préparation de l'examen et sont susceptibles d'être modifiées sans préavis. Étant donné la nature de cet avis (lié à la monnaie et aux taux d'intérêt), il n'est généralement pas de nature spécifique.   Il n'y a donc aucune référence à un quelconque contrat de financement d'entreprise et il n'y a donc pas de vue d'ensemble sur 12 mois basée sur les différents avis. Ce document n'est valable que pour une période très limitée, en raison de l'évolution rapide des conditions du marché.

Publications liées

L'éclaircie se poursuit au-dessus du marché du logement européen

L'éclaircie se poursuit au-dessus du marché du logement européen

La RBNZ accélère son virage politique

La RBNZ accélère son virage politique

Le nouveau premier ministre Ishiba laisse peu de choix à la BoJ

Le nouveau premier ministre Ishiba laisse peu de choix à la BoJ

Le patron de la NBP change son fusil d’épaule

Le patron de la NBP change son fusil d’épaule