De l'intérêt de laisser des portes ouvertes...
Tant la Fed que la BCE, la Banque d’Angleterre ou les marchés cherchent toujours à savoir jusqu'où les taux d’intérêt doivent grimper pour contenir l’inflation. Les banques centrales qui avaient pris les devants, comme en Tchéquie (CNB), en Hongrie (MNB) ou en Pologne (NBP), commencent doucement à penser qu'elles en ont fait assez pour ramener "à terme" l’inflation vers son ’objectif. Le marché n’en est en revanche pas encore convaincu Une approche tactique s'impose donc. Les réunions de politique de la MNB et de la CNB ont montré qu’il était encore trop tôt pour placer le marché devant le fait accompli.
Hier, la CNB a maintenu son taux directeur à 7 % pour la deuxième fois consécutive. Après la mise en place de la nouvelle équipe en août, la majorité des membres du comité de politique, dirigé par le gouverneur Aleš Michl, ont expliqué qu’ils ne voulaient pas freiner inutilement l’économie. Deux partisans de la ligne dure ont tout de même voté en faveur d’un relèvement de 75 points de base. L’inflation tchèque a « ralenti » en août à 17,2 % en glissement annuel, mais elle pourrait grimper en direction de 20 % plus tard dans l’année. Ensuite, les pressions sur les prix devraient rapidement s'atténuer. La CNB espère un retour en direction de 2 % en 2024. Si la banque centrale préfère ne pas resserrer davantage ses taux, elle laisse tout de même la porte ouverte. Un ajustement à la hausse n'est pas exclu en cas d’accélération des hausses salariales ou d’une politique fiscale plus généreuse. Face à l'équilibre tendu entre l’offre et la demande, il est également important pour le marché d’avoir la perspective d’un taux directeur réel positif. Si, comme la CNB le prévoit, l'inflation baisse rapidement l’année prochaine, c’est alors envisageable. Mais quoiqu’il arrive, la CNB souligne que les taux resteront élevés pendant relativement longtemps.
Une petite parenthèse s'impose ici. Y a-t-il une perspective (et si oui, quand) d’un taux directeur réel positif dans l’UEM si la BCE relève son taux directeur à environ 3 % l’année prochaine ? L’UEM n’est pas la Tchéquie ou la Hongrie, mais l’orientation du marché est claire...
Retour en Tchéquie. La réaction de la couronne est déjà encourageante. Le cours EUR/CZK est passé de 24,70 à 24,55 après la décision de la CNB. Les taux du marché monétaire intègrent encore un dernier relèvement au quatrième trimestre, mais pas plus.La CNB a visiblement trouvé un équilibre crédible. Quoiqu’il arrive, elle continuera de soutenir la devise en intervenant sur les taux de change si nécessaire. Jusqu’à présent, le niveau de EUR/CZK 24,70/75 était la ligne dans le sable (pas communiqué de manière officielle).
Plus tôt cette semaine, la MNB hongroise a tenté une autre tactique. Elle a rehaussé son taux directeur plus fortement que prévu, de 125 points de base à 13 %, mais elle a en même temps formellement déclaré qu’il s’agissait du dernier relèvement. La MNB resserrera encore sa politique via de mesures visant à limiter les liquidités. En août, l’inflation générale s’élevait à 15,6 % et l’inflation de base à 19 %. La MNB reconnaît également qu’elle pourrait encore progresser dans les mois à venir, mais estime que l'objectif de 3,0 % +/- 1,0 % pourra être atteint au début de 2024.
Le marché hongrois est clairement moins rassuré que le marché tchèque. Hier, le forint est tombé à un nouveau plancher historique, au-dessus de EUR/HUF 420. Outre le fait que le marché n'est pas convaincu de la fin définitive du cycle des taux, la volatilité générale a également provoqué un regain de pression sur le HUF. La MNB ne dispose pas des mêmes réserves de change que son homologue tchèque. Et sa communication ferme et définitive sur la fin du cycle des taux risque de lui revenir au visage tel un boomerang, surtout si l'incertitude générale persiste sur le marché. La situation reste très instable pour le forint...