La BoE est prête à accélérer en novembre
Hier, la Banque d’Angleterre (BoE) a relevé son taux directeur pour la septième fois consécutive. Après des premières interventions plus modestes, c'est la deuxième fois d'affilée que le taux est rehaussé de 50 points de base, de 1,75 % à 2,25 %. Au Royaume-Uni aussi, il faut remonter à avant la crise financière de 2008 pour retrouver un taux directeur aussi élevé.
Contrairement à ce qui s’est passé à la Fed mercredi, la décision de la BoE n’a pas été prise à l'unanimité. Trois des neuf gouverneurs voulaient intervenir de manière plus agressive, avec une hausse de 75 pb, alors que le nouveau venu, Swati Dhingra, préférait se limiter à 25 pb. Contrairement à la BCE et à la Fed, la banque centrale britannique ne disposait pas de nouvelles prévisions de croissance et d’inflation. Ce rapport détaillé n'est prévu qu’en novembre. Ce n'est pas une mauvaise chose en soi, car la BoE sera à ce moment-là en mesure de tenir compte de l’impact des mesures de soutien budgétaires du nouveau gouvernement britannique. Ce dernier a décidé de geler la facture énergétique des ménages et des entreprises et présentera aujourd’hui un budget destiné à financer ces mesures.
Les effets de ces aides joueront un rôle déterminant sur l'évolution des taux de la banque centrale britannique. D’un côté, ces mesures permettront de réduire le pic d’inflation (principale) au Royaume-Uni. Celle-ci ne devrait donc pas atteindre ou dépasser le cap redouté des 13 %, mais elle devrait tout de même afficher un taux légèrement supérieur à 10 % en octobre. D’un autre côté, ce plan de soutien risque d’exercer un effet inflationniste en donnant un coup de pouce au consommateur britannique. Les orientations données pour les prochaines réunions permettent déjà d'y voir un plus clair. Comme la dernière fois, la banque centrale a déclaré qu’elle agirait si nécessaire avec détermination pour lutter contre l’inflation et éviter un dérapage des anticipations d'inflation. Cette fois-ci, elle a également ajouté que les pressions inflationnistes pourraient aussi venir du côté de la demande (en raison du plan de soutien donc) et pas uniquement de l’offre.
Les marchés des taux britanniques ont entendu ce message et tablent désormais sur un relèvement de taux de 75 points de base à la réunion de novembre. C'est également le scénario privilégié pour décembre. Toutes ce interventions porteraient donc le taux directeur britannique à 3,75 % en fin d'année. Pour fin 2023, le marché des taux table sur 5 %. Reste à savoir si la Banque d’Angleterre ira jusque là. Indépendante, la banque centrale risque, avec sa politique monétaire restrictive , de se heurter au gouvernement britannique. Celui-ci envisagerait même l’introduction d’un objectif de croissance officiel de 2,5 %.
Les taux swaps britanniques ont gagné 8 à 15 points de base hier. Cette fois-ci, la plus forte hausse a eu lieu sur la partie la plus longue de la courbe. Tout d’abord, ce segment de marché intègre de plus en plus l'idée véhiculée de plus en plus ouvertement par les banquiers centraux que les taux directeurs resteront élevés pendant longtemps. En outre, la Banque d’Angleterre a décidé de procéder à des ventes actives dans son portefeuille obligataire. Au cours des 12 prochains mois, elle compte réduire la taille de son bilan de 80 milliards de livres via ces ventes actives, lesquelles s'ajouteront à la diminution naturelle du portefeuille (titres arrivant à échéance). Elle sera la première banque centrale à utiliser cette option dans le cadre de la normalisation de sa politique. La livre sterling a perdu la semaine dernière un important niveau de résistance vis-à-vis du dollar et de l’euro et elle ne parvient pas à le récupérer. Le cours EUR/GBP reste supérieur à 0,8721 et devrait plutôt dépasser 0,90.
Mathias Van der Jeugt, salle des marchés KBC