Truss veut, mais ne peut pas aider la livre

Les marchés

Le Royaume-Uni a une nouvelle Première ministre. Comme prévu, Liz Truss a été élue par les membres de son parti conservateur, au détriment de Rishi Sunak (53 % contre 47 %). Elle est déjà la troisième à occuper le 10 Downing Street depuis le référendum sur l’UE de triste mémoire organisé par Cameron en juin 2016. Pour son entrée en fonction, Truss envisage de geler les factures énergétiques des consommateurs britanniques, au lieu de procéder aux réductions d’impôts prévues. Les entreprises britanniques pourront également faire appel à des aides budgétaires (programme de soutien de 40 milliards de livres).

En avril, le plafond de la facture de gaz et d’électricité (un héritage de la libéralisation du marché de l’énergie britannique) a augmenté d’environ 700 livres à un peu moins de 2 000 livres pour un ménage moyen. Le régulateur de l’énergie Ofgem avait déjà prévenu que la note allait encore gonfler de 80 % (>3 500 livres) en octobre en raison de la hausse exponentielle des prix de l’énergie depuis l’invasion russe en Ukraine. À la fin du mois dernier, Cornwall Insight (le Test-Achats britannique pour le marché de l’énergie) tablait sur des hausses à 5 400 livres en janvier 2023 et 6 600 livres en avril 2023. Selon ces hypothèses, la facture énergétique risque donc d'être multipliée par cinq en seulement un an.

Le nouveau gouvernement britannique veut apporter son aide. Selon des documents ayant fuité, il devrait geler la facture d’énergie aux niveaux actuels pendant un an et demi et prendre lui-même en charge la différence de prix. Ce mécanisme pourrait, selon les estimations, coûter jusqu’à 130 milliards de livres aux pouvoirs publics. Les autorités entendent ainsi préserver le pouvoir d’achat des ménages britanniques sur le court terme. L’inflation britannique a en effet atteint 10,1 % en glissement annuel et va encore augmenter. Les scénarios les plus pessimistes, prévoyant une accélération jusqu’à 20 % en glissement annuel au début de l’année prochaine, sont désormais écartés. Le mécanisme envisagé devrait permettre d"éviter le scénario du pire en termes d'inflation, mais pour le reste, il n'aura pas beaucoup d'impact sur la pression globale exercée sur les prix.

Le bazooka britannique est une arme à double tranchant pour la livre sterling. À court terme, les mesures de soutien à la demande pourront préserver la croissance. Du moins si le Britannique moyen ne choisit pas de mettre de côté les moyens « libérés ». Les citoyens s'attendent en effet à des temps encore plus difficiles. Le deuxième mécanisme qui pourrait jouer est celui de la banque centrale. En théorie, une politique budgétaire souple est complétée par une politique monétaire plus dure. La grande question est de savoir si la Banque d’Angleterre sera prête à appuyer sur le frein lorsque le gouvernement appuiera à fond sur l'accélérateur. En outre, les prévisions d’inflation seront moins sombres en raison de l’intervention artificielle. Hier, le pic du taux directeur britannique (marché monétaire) était attendu à 4,5 % en août de l’année prochaine. Aujourd’hui, il est à... 4,25 %. De l’autre côté de la paire de devises, la BCE/l’euro sont sur le point d'opérer un mouvement de rattrapage.

S’il reste des points d'interrogation autour des éventuels avantages à court terme pour la livre, les points d’exclamation s'imposent par rapport aux désavantages sur le long terme. Cela fait des années que le Royaume-Uni est confronté à un déficit de la balance courante, mais celui-ci a tout de même atteint 7 % (!) du PIB au premier trimestre. À cela s’ajoutera un déficit budgétaire colossal dans les prochaines années. L’inflation relativement plus élevée, les répercussions du Brexit et l'accroissement des « twin deficits » sont des facteurs qui pèsent sur la livre. À terme, le cours EUR/GBP devrait repasser au-dessus de 0,90.

Mathias Van der Jeugt, salle des marchés KBC

EUR/GBP : la livre a de mauvaises cartes en main, en particulier sur le long terme.

Bron: Bloomberg

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