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Circulation à sens unique sur le marché des taux

Les marchés

Nous nous sommes aujourd'hui habitués aux chocs "disproportionnés" sur les marchés des taux. Après plus de 10 années au cours desquelles les évolutions des taux se sont exprimées en points de base, nous sommes subitement passés à des points de pourcentage au cours de ce premier semestre. La correction observée depuis la mi-juin, et la reprise observée ce mois-ci, sont des mouvements que nous n'avions plus vus depuis très longtemps. Le marché (et les banquiers centraux) tentent de cerner la nouvelle donne monétaire à coups d'essais et d'erreurs.

Le mouvement observé au Royaume-Uni le mois passé a valeur d'exemple. La Banque d’Angleterre (BoE) a rapidement été confrontée au dilemme entre croissance et inflation. Jusqu'où relever les taux si la crise du coût de la vie venait à freiner la croissance ? Au début du mois, le marché s’attendait à ce que, dans le meilleur des cas, la BoE rehausse son taux directeur (à l’époque à 1,25 %) à 2,75 % à la mi-2023. Aujourd’hui, il est plutôt question de 4,25 % ou 4,5 % ! Le marché a également abandonné l’idée qu’il pourrait y avoir une marge d’assouplissement par la suite. Le scénario est le même pour l’UEM. Il y a un mois, le marché tablait sur un taux (de dépôt) de la BCE de 1,0 % vers la fin de l’année. C'est à peu près tout. Aujourd’hui, c'est un taux de quasi 2,0 % qui est avancé pour le milieu de l'année prochaine.

Que s’est-il passé entre-temps ? Il y a un mois, l’idée selon laquelle la récession qui s’annonce empêcherait les banques centrales de relever fortement leurs taux d’intérêt dominait encore. Les perspectives de croissance (en Europe) ne se sont entre-temps pas améliorées, en raison de la flambée des prix du gaz et de l’électricité. Le passage de l’inflation britannique au-dessus de la barre des 10 % a cependant eu un effet symbolique. Cette inflation est en grande partie due à des facteurs externes sur lesquels la BoE n’a pratiquement aucune prise. Dans un même temps, il apparaît de plus en plus clairement que l’inflation externe initiale percole dans l’économie "intérieure" via de nombreux canaux. On parle donc ici d’effets de second tour et d'un terrain sur lequel les banquiers centraux peuvent agir. À cela s'ajoutent aussi les pénuries sur le marché de l’emploi. Un plus un égale deux. Les taux d’intérêt doivent être relevés afin de briser cette spirale, même si cela doit se faire au prix d'une nouvelle contraction de la demande.

Le mouvement aux États-Unis est un peu moins prononcé. La Fed se trouve déjà à un stade plus avancé que la BoE et la BCE. Pourtant, les gouverneurs de la Fed se sont récemment quasiment tous exprimés sur la nécessité de continuer à relever les taux aux États-Unis, tout en pointant l’absence de marge pour un éventuel assouplissement. À cet égard, nous attendons avec impatience l’analyse que fera le président de la Fed, Jerome Powell, lors du symposium de Jackson Hole demain. Dans un premier temps, le marché sera attentif à ce que le président de la Fed a à dire sur l’équilibre entre l'inflation et la croissance. À cet égard, des références au ralentissement de la croissance impliquent toujours le "risque" que le marché retombe dans son schéma de juin/juillet. Pour éviter cela, Powell pourrait sortir une autre carte, celle du "taux neutre". Il s’agit d’un concept un peu ésoténique, difficile à définir et encore plus difficile à quantifier. Pour faire simple, disons que ce taux correspond à celui qui permet de maintenir la croissance/demande sur une trajectoire qui ne stimule pas non plus l’inflation. Dans les projections de la Fed ("dots") du mois de juin, les gouverneurs situent ce taux neutre à 2,5 %. Dans ce contexte, un taux directeur de 3,5 % ou plus, comme le marché l’anticipe pour l’année prochaine, est déjà fortement restrictif. Reste à savoir si un taux de 2,5 % suffira en effet à porter/maintenir l’inflation à 2 % (à terme). Si le président de la Fed vient à remettre en question le niveau du taux neutre, le point de référence utilisé pour évaluer le caractère restrictif de la politique changerait également. Après le récent rallye, beaucoup de choses ont évidemment déjà été intégrées dans les cours, mais d'éventuelles allusions au fait que le taux neutre pourrait être plus élevé que celui pris en compte jusqu’à présent par le marché (et la Fed) ne passeraient pas inaperçues.

Taux à 2 ans aux États-Unis (noir), au Royaume-Uni (bleu) et dans l'UEM (jaune) : marchés (et banquiers centraux) à la recherche du taux "neutre"

Bron: Bloomberg

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