Royaume-Uni: des chiffres qui favorisent un relèvement des taux
La semaine dernière, le dernier rapport économique détaillé du Royaume-Uni était rien moins qu’impressionnant. En octobre, l’inflation britannique s’est accélérée de 1,1% en glissement mensuel pour atteindre 4,2% sur une base annuelle. La dernière fois que les prix ont augmenté du double de l’objectif de la Banque d’Angleterre remonte à tout juste moins de 10 ans. L’inflation de base est également en hausse: à 3,4% en glissement annuel, elle retrouve ainsi le rythme qu’elle présentait il y a une décennie.
Passons au consommateur britannique. Le mois dernier, il s’est montré généreusement dépensier: le commerce de détail a entamé le quatrième trimestre en force, avec une hausse du chiffre d’affaires de 0,8% en glissement mensuel. En excluant le carburant automobile, ce pourcentage atteint même 1,6%. Cependant, la forte inflation fausse l’image, car les ventes au détail sont une série nominale. Mais même en corrigeant de ces effets de prix, la hausse s’élève toujours à 0,9% en glissement mensuel pour la série la plus restreinte. Après quelques mois de pessimisme, le Royaume-Uni connaît un regain de confiance (indicateur GfK de -18 à -14). La vigueur du marché de l’emploi est certainement en cause: en juillet-septembre, l’emploi a progressé de 247 000 unités et le taux de chômage a atteint un nouveau plancher post-pandémique de 4,3%. Mieux encore, les chiffres du mois d’octobre reflètent une vigueur persistante. Les demandes d’allocations de chômage ont encore diminué (de 15 000 unités). Le rapport sur l’emploi “officieux” publié par le service des impôts britannique fait état d’une croissance de l’emploi de 160 000 unités en octobre. Étant donné que les mesures de soutien des pouvoirs publics ont été supprimées depuis septembre, c’est très encourageant.
La Banque d’Angleterre ne peut que se réjouir de cette évolution. La crainte de ce qui arriverait quand on retirerait le filet de sécurité du marché du travail était pour ainsi dire la seule raison pour laquelle le comité de politique n’a pas relevé ses taux début novembre. Outre les titres respectifs d’économiste en chef et gouverneur de la BoE, Pill et surtout Bailey ont ainsi endossé ceux de principaux contradicteurs, car ils laissaient clairement entendre autre chose à l’approche de cette réunion. Finalement, les chiffres vigoureux ne les ont pas empêchés de rendre un nouvel avis vis-à-vis du marché, en changeant tous deux leur fusil d’épaule. Selon Pill, l’issue de la réunion de politique monétaire du mois prochain n’est certainement pas courue d’avance. C’est une lame à double tranchant: le ralentissement de la croissance a partie liée avec une forte inflation, principalement issue du côté de l’offre. Il a ajouté qu’il n’existait pas de solution rapide (lisons entre les lignes: un relèvement des taux) pour lutter contre ce type d’inflation. Lors d’une interview le week-end dernier, Bailey a repris le discours de Pill.
Quant aux marchés, ils accordent peu de crédit à la communication des numéros un et deux de la Banque d’Angleterre et sur ce point, nous ne leur donnons pas tort. Le marché monétaire britannique tient toujours compte de la date du 16 décembre pour marquer le début d’un cycle de resserrement (+10 points de base). De fait, à supposer que le rapport sur le marché de l’emploi attendu le mois prochain (14 décembre) ne déçoive pas, c’est une quasi-certitude. Reste à savoir si la livre sterling s’appréciera encore à court terme: depuis quelques jours, le cours EUR/GBP fluctue autour de 0,84, la dernière étape avant un retour au plancher pluriannuel pré-pandémique situé entre 0,825 et 0,83. Mais pour l’instant, les investisseurs de la livre peuvent compter sur une période de marasme pour l’euro – avec les compliments de la BCE.