La Banque d’Angleterre suit ses collègues
La Banque d’Angleterre a été la première banque d'une économie avancée à lancer le cycle de resserrement. Ce démarrage relativement précoce a permis à la banque centrale, contrairement à ses collègues, de maintenir un rythme constant de 25 points de base. Les circonstances ont cependant poussé à une action plus drastique hier.
Avec son relèvement de 50 pb, la BoE surfe sur la vague de resserrement plus agressif observée dans le monde. Le taux directeur s’élève à présent à 1,75 %,son niveau le plus élevé depuis la crise financière. À partir de septembre, un resserrement supplémentaire sera opéré via la réduction active du bilan, à concurrence de 10 milliards de livres par trimestre. Si l'on ajoute à cela la réduction naturelle du bilan (le fait de ne pas remplacer les obligations arrivées à échéance), la BoE table pour l’année à venir sur une baisse de 80 milliards de livres de son portefeuille, qui pèse actuellement 850 milliards.
La Banque d’Angleterre avait déjà préparé les marchés à la possibilité d'une intervention plus agressive si elle estimait que l’inflation était devenue encore plus tenace. Les nouvelles prévisions laissent peu de doutes à ce sujet. Le prix du gaz a considérablement augmenté depuis les dernières projections (en mai). Dans un même temps, la vigueur historique du marché de l’emploi entraîne une croissance des salaires encore plus forte. L’inflation culminera ainsi au quatrième trimestre de cette année à plus de 13 %, contre 10 % prévus précédemment. Et aucune véritable amélioration n'est attendue pour 2023. Selon les estimations, l’inflation s’élèvera à 9,5 % au troisième trimestre de l’année prochaine. La Boe s’est donc vue contrainte d’intervenir de manière plus drastique.Elle affirme toutefois que ces 50 points de base ne deviendront pas nécessairement la nouvelle norme. Dans sa nouvelle guidance, la banque ne parle plus de "futures hausses de taux", mais bien de "changements". Les données joueront ici un rôle déterminant. La BoE dresse un tableau très sombre de l’avenir. Cette inflation élevée contre laquelle la BoE lutte provoque la perte de revenus la plus importante subie par les ménages britanniques depuis plus de 60 ans. Cela aura un impact sur la consommation. La banque centrale anticipe une récession à partir du quatrième trimestre de cette année et qui durera jusqu’à la fin de 2023 (!). Cela a créé une onde de choc sur le marché des taux britannique, qui s'est ensuite propagée à l'Europe et aux États-Unis. Mais le repli initial a rapidement été suivi d’un rebond. Face à la vigueur de l'inflation, le marché se rend compte que la BoE pourrait difficilement ne pas relever ses taux à moins de 3 % comme prévu actuellement (et encore moins les abaisser rapidement). La livre sterling a néanmoins clôturé la séance sur de lourdes pertes. Le cours EUR/GBP a bouclé au-delà de 0,84 et la correction n’est selon nous pas encore terminée.
La banque centrale tchèque (CNB) s’est également réunie hier. Il s'agit de la première réunion sous la direction d’Aleš "toute l'inflation est exogène" Michl et de son nouveau conseil d’administration. La banque a décidé de maintenir son taux directeur à 7 % (5-2), bien qu’elle s’attende à une inflation largement supérieure à l’objectif, tant cette année que l’année prochaine. La CNB a eu recours à une petite astuce en prolongeant son horizon de politique de 12-18 mois à 18-24 mois. D’ici là, l’inflation devrait s'être suffisamment atténuée. Michl compte néanmoins débattre d'un éventuel relèvement de taux lors de la prochaine réunion. Nous pensons que ces discussions devraient déboucher sur une dernière intervention de 50 points de base. Le marché n’est pas convaincu et a tiré ses conclusions : le taux ne grimpera pas au-delà de 7 %. Les taux des swaps tchèques ont chuté de plus de 20 pb.
Pour la couronne tchèque, la réunion de la CNB suscite un sentiment d'ambiguïté. D'un côté, la devise a perdu le soutien espéré (et en fait indispensable) des taux. Mais de l'autre, la banque centrale a confirmé son intention d’intervenir sur le marché des changes afin de contrer toute forte dépréciation de la CZK. Le cours EUR/CZK a même poussé un soupir de soulagement et a atteint 24,58. Nous pensons néanmoins que le marché continuera de tester l’engagement de la CNB durant les mois d’été. En tant que banque centrale, toute perte de crédibilité a un coût.