Quid après le "hat trick" de la RBA ?
Ce matin, la banque centrale australienne (Reserve Bank of Australia, RBA) a relevé son taux directeur de 50 points de base pour la troisième fois consécutive. Si l’on tient compte de la première intervention de 25 pb effectuée il y a à peine cinq mois, le "hat trick" réalisé par la RBA a porté le principal taux directeur à 1,85 %. Seul un analyste espérait un resserrement un peu plus agressif (65 pb) pour amener le taux directeur à 2 %. Cela n'a donc pas été le cas. Quoi qu'il en soit, le taux de la RBA a atteint son niveau le plus élevé depuis 2016. La fin du cycle de resserrement n’est pas encore en vue. Mais Sydney a légèrement ajusté certaines de ses priorités.
Plusieurs ajouts apportés dans le communiqué qui accompagne la décision nous amènent à ce constat. Dans son communiqué, la RBA met l'accent sur le retour de l’inflation aux alentours de l’objectif de 2-3 %, mais elle accorde aussi davantage d’attention au délicat équilibre entre une normalisation agressive et les conséquences pour l’économie. Vu l'accélération des hausses de prix (6,1 % au deuxième trimestre), la banque s’attend à prendre de nouvelles mesures monétaires, mais pas selon une trajectoire prédéfinie. Il s’agit d’une petite nuance, mais sans elle, la RBA aurait donné l’impression de vouloir continuer avec des hausses de 50 pb (ou plus). Ce n’était clairement pas le signal qu’elle souhaitait donner aujourd’hui. Les réflexions de la RBA se reflètent également dans les nouvelles prévisions. La banque a ainsi revu le taux de croissance fortement à la baisse. Grâce à la vigueur du marché de l’emploi et du commerce extérieur, celle-ci s’élèvera probablement encore à 3,25 % cette année, mais il s’agit tout de même d’une révision radicale par rapport aux 4,25 % attendus en mai. Au cours des prochaines années, la dynamique s'essoufflera pour atteindre 1,75 % (taux de 2 % prévu en mai), notamment en raison de la politique de normalisation de la RBA. Cette politique restera toutefois nécessaire jusqu’à nouvel ordre, au vu du net relèvement des prévisions d’inflation pour cette année (de 6 % à 7,75 %). Ce n’est qu’en 2024 que le niveau des prix augmentera à nouveau à un rythme plus acceptable de 3 %. Il y a un mois, la RBA misait encore sur 2023. Elle se donne donc un délai supplémentaire d’un an, ce qui lui permettra peut-être d'appuyer moins fort sur la pédale de frein à court terme.
Le marché monétaire australien envisageait déjà un scénario dans lequel la RBA ralentirait le rythme des resserrements. Il s’attendait toutefois à ce que ce ne soit le cas qu’après la réunion de septembre. Les taux des swaps ont perdu entre 10 et 14 pb. Avec des resserrements "réguliers" de 25 pb, le pic du taux directeur est attendu aux alentours de 3,25 % au premier trimestre de l’année prochaine. La déception est palpable au niveau du dollar australien. Le cours AUD/USD a plongé à 0,692, après avoir ouvert à 0,703. Le contexte actuel d’aversion pour le risque n’aide évidemment pas la devise australienne.
Cette réaction du marché est peut-être prématurée. La RBA accorde en effet un peu plus d’importance à la croissance, mais ses actions restent avant tout motivées par les données. Or, elle estime que l’inflation pourrait continuer à grimper dans les prochains mois. Dans l'hypothèse où l’économie ne dérape pas totalement, nous estimons par conséquent qu'il sera trop tôt pour ralentir le cycle en septembre. Pour le dollar australien, ce n'est probablement qu'une maigre consolation, surtout par rapport à son pendant américain. Une pause de ce dernier a récemment permis au cours AUD/USD de reprendre un peu de couleurs. Au vu des perspectives (craintes) d'un ralentissement de la croissance, nous pensons que le potentiel haussier de la paire AUD/USD est pour le moment limité. La zone autour de 0,72 constitue un solide niveau de résistance.