Le forint hongrois dos au mur
Hier, le forint hongrois a clôturé la journée à son deuxième niveau le plus bas jamais enregistré (EUR/HUF 390). Avant cela, le cours n’était tombé plus bas que lors de la semaine qui a suivi l’invasion de l’Ukraine. Cette dépréciation est due au Premier ministre, Viktor Orban. Ragaillardi par sa victoire contre la coalition d’opposition aux élections, ce dernier a frappé fort dès la première séance du nouveau parlement.
C’est surtout avec l’UE que le bât blesse. La Hongrie ne soutient pas la proposition d’embargo énergétique contre la Russie et refuse d’envoyer des armes en Ukraine. En outre, les tensions avec la Commission européenne ne sont pas près de s’atténuer. La Commission a déjà bloqué 7 milliards d’aide budgétaire en raison de soupçons de corruption. “ Dieu, la chance et Viktor Orban” est depuis longtemps la formule magique pour réussir en Hongrie. Les montants bloqués pourraient encore être plus élevés si la CE condamne la Hongrie pour des violations de l’État de droit.
Orban aurait pourtant bien besoin des fonds européens pour l’aider à combler le trou dans son budget. Durant la campagne, Orban n’a pas ménagé ses efforts pour se mettre les électeurs dans la poche. À coup de subsides et de plafonnement des prix, il est parvenu à ralentir l’érosion du pouvoir d’achat des ménages, malgré une inflation de 9,5 % en glissement annuel en avril. Contrairement à ce qui se passe en Europe, par exemple, la Hongrie est actuellement confrontée à une spirale prix/salaires. Les derniers chiffres en date (février) font état d’une hausse des salaires bruts moyens de 31,7 % en glissement annuel (allocations uniques comprises).
Les chiffres du PIB du premier trimestre publiés ce matin montre que l’aide budgétaire a un effet positif sur la croissance. Sur une base trimestrielle, le PIB affiche, comme à la fin de l’année passée, un beau taux de croissance de 2 %. Cela contraste fortement avec le taux de 0,3 % en glissement trimestriel enregistré dans l’UEM. Le bureau des statistiques hongrois n’a pour le moment encore publié que le côté production de la croissance du PIB. Les services et l’industrie manufacturière ont progressé. En principe, cela est de bon augure pour la consommation et les exportations (nettes).
Le forint ne profite pas de ces chiffres. Il s’est légèrement apprécié, mais cela est davantage dû au climat plus positif vis-à-vis du risque. Les bourses européennes ont repris jusqu’à 1,5 %. La monnaie compte surtout sur la banque centrale (MNB) pour du soutien. Aujourd’hui, le vice-président Virag a plaidé en faveur de taux réels positifs. La MNB a relevé son taux directeur de 100 points de base en mars et en avril (actuellement 5,4 %). Mais la banque ne pourra tenir ce rythme effréné, selon Virag. Le marché des taux table sur un taux directeur de plus de 8 % à la fin de cette année. Pour aider plus rapidement sa monnaie, la MNB pourrait de nouveau jouer avec son taux de dépôt hebdomadaire, une recette qui a déjà fait ses preuves dans un passé récent. Actuellement à 6,45 %, ce taux pourrait être rehaussé jeudi. Tout soutien sera le bienvenu pour le forint.
Mathias Van der Jeugt, KBC Marktenzaal