Un répit pour la livre, malgré des données mitigées
Ce matin, les chiffres de l’activité économique du Royaume-Uni renvoient une image mitigée et plutôt pessimiste. Une estimation de la croissance du PIB pour le mois d’août s’est tout juste établie à 0,2% en glissement mensuel. Mais derrière ce chiffre se cachent de grandes divergences entre les différents secteurs. L’activité dans la construction (-0,5% en glissement mensuel) et l’industrie manufacturière (-0,8% en glissement mensuel) s’avère particulièrement faible. De son côté, le secteur des services s’est redressé (0,4% en glissement mensuel), mais après un mois de juillet difficile. Les chiffres mensuels sont par définition extrêmement volatils. Dans son analyse suite à la décision sur les taux prise le 21 septembre, la Banque d’Angleterre (BoE) admettait déjà que l’espoir d’une croissance trimestrielle moyenne de 0,25% au S2 manifesté dans le rapport de politique du mois d’août était sans doute trop optimiste. Les chiffres publiés aujourd’hui confirment sans réserve ce point de vue.
En septembre, la BoE était partagée sur la question de laisser le taux directeur inchangé (à 5,25%). Ils étaient quatre à préférer le relever de 25 points de base. Cinq autres membres, y compris le président Bailey, ont voulu et obtenu une pause. Le point de vue de la majorité était avant tout dicté par le refroidissement longtemps espéré de l’inflation. En effet, les chiffres du mois d’août (en glissement annuel: 6,7% pour l’inflation générale, 6,2% pour l’inflation de base) se sont révélés meilleurs que prévu, quoique toujours supérieurs à l’objectif de 2%. L’on peut aussi noter que cette baisse s’est amorcée bien plus tard que ce que Bailey et ses collègues avaient anticipé. La BoE a néanmoins profité de la surprise positive pour lever le pied du frein de la politique monétaire. La semaine prochaine, nous disposerons des chiffres de l’inflation pour le mois de septembre. Les aspects techniques (effets de base) sont plutôt favorables (et le seront plus encore pour le mois d’octobre). L’inflation annuelle pourrait encore ralentir. Le comité de politique tient également compte de la fragilité de la croissance.
Quoi qu’il en soit, cette pause quelque peu surprenante (et peut-être prématurée) a temporairement pesé sur les performances de la livre et poussé le cours EUR/GBP vers 0,87. La BoE réitère son engagement de relever encore le taux si la pression inflationniste s’avère plus forte que prévu. Mais c’est un engagement flexible et sujet à interprétation, plutôt qu’une ferme intention de ramener l’inflation à 2% le plus rapidement possible.La décision de septembre est intervenue dans un contexte de forte hausse des taux (réels) aux États-Unis (et dans l’UEM). Cette tendance s’est à présent interrompue. Depuis la semaine dernière, la pression sur la livre s’est atténuée. Les marchés monétaires n’estiment plus qu’à 50% la probabilité que la BoE relève encore les taux une dernière fois cette année ou au début de l’année prochaine.
Maintenant que la BCE et la Fed ont appuyé sur le bouton pause (bien que les chiffres CPI aux États-Unis puissent toujours influencer le débat…), la BoE et la livre peuvent encore se permettre une politique anti-inflation laxiste. Mais en attendant, les taux réels britanniques (tant le taux directeur moins l’inflation que le taux réel des obligations d’État à 10 ans) reste (trop) bas. Cela rend la livre vulnérable. Le ‘sweet spot’ actuel pourrait s’avérer éphémère, par exemple si les taux renouent avec leur tendance haussière sous-jacente ou en cas de forte correction risk-off. À court terme, la paire EUR/GBP se consolide entre 0,8493 et 0,8706. Quoi qu’il en soit, nous pensons que la monnaie britannique est plus à sa place dans la partie supérieure de cette fourchette. À un peu plus long terme, nous maintenons le scénario d’une rupture haussière et d’un affaiblissement tendanciel de la livre.