Avant la récession économique, récession modérée des bénéfices
La saison des résultats du T1 n’a pas été sans rappeler une phase du coronavirus: beaucoup d’angoisses pour un impact finalement bénin. La chute des prévisions de bénéfices pour 2023 qui dure depuis toute l’année a fait place à la stabilisation, voire une fragile touche d’optimisme. Vu les valorisations actuelles, c’est la moindre des choses.
Au-dessus des attentes (modestes)
92% des entreprises du S&P500 ont présenté leurs chiffres. 78% d’entre elles ont pu faire état de résultats au-dessus des attentes, soit la proportion la plus importante depuis le troisième trimestre 2021, et jusqu’à 6,5% au-dessus des prévisions de bénéfices (certes modestes). Aux États-Unis, les bénéfices n’ont finalement pas diminué de 6,7% en base annuelle, mais ‘seulement’ de 2,5%. Ce deuxième trimestre consécutif de baisse des bénéfices permet donc de parler de ‘récession des bénéfices’. 57% des entreprises ont revu leurs prévisions de bénéfices à la baisse, ce qui est toujours mieux que prévu. Un optimisme prudent est de mise, qui se traduit chez les analystes par une appréciation de 0,8% des attentes pour le deuxième trimestre. À la veille d’une récession économique possible, c’est plutôt surprenant. Quant à la dépréciation du dollar, elle semble à peine intervenir.
En Europe, les bénéfices ont grimpé de 6,7% en base annuelle, grâce au secteur financier (+51%) et malgré les matières premières (-48%). Sans le secteur de l’énergie, les gains s’élèveraient à 9,4%. Alors que le chiffre d’affaires n’a progressé que de 0,5% en raison de la baisse des stocks, les économies de coûts et surtout les augmentations de prix dans 66,3% des entreprises européennes ont créé une surprise positive, ce qui n’est pas rien. En Belgique, comme toujours, la diversité de la taille des entreprises et des industries complique l’évaluation. Mais là encore, le recul s’avère moins prononcé que prévu, grâce aux activités internationales et à l’impact positif évident des hausses de prix, surtout pour Solvay et AB Inbev dans une moindre mesure.
Pas de pitié pour les perdants
Les résultats ont eu un impact asymétrique sur les marchés. En moyenne, les cours des entreprises qui ont agréablement surpris les investisseurs ont à peine augmenté. Par exemple, le bénéfice inattendu de 0,85 dollar affiché par Tesla n’a pas empêché l’action de perdre 11,7%. Néanmoins, les mauvaises surprises ont été clairement sanctionnées, de 4,1% en moyenne (contre -2,2% ces 5 dernières années). Voir Tyson Foods, mais aussi Alfen (-10%).
Fin de la baisse des prévisions de bénéfices
Pour 2023, les marchés misent à présent sur une quasi-stagnation des bénéfices pour le S&P500: +1,2%. C’est nettement inférieur à la croissance bénéficiaire de 9,8% anticipée il y a encore un an. Pour le secteur technologique aussi, les estimations sont tombées de 21% à 11,5%. Mais la baisse observée pendant toute l’année semble s’être interrompue (temporairement ou non) grâce à un T1 (relativement) solide. Nous assistons à un revirement, notamment pour le Stoxx 600, qui suggère à présent une croissance bénéficiaire de 1,7% contre 0,2% début avril et +4,2% il y a un an. Ce revirement ou cette stabilisation est un élément important pour la valorisation. Pour 2023, le ratio cours-bénéfice aux États-Unis s’élève à présent à 17,9x, contre 15,9x en septembre 2022. En Europe, la valorisation est passée de 11,5x à 12,5x. À la lumière d’une récession imminente, c’est plus qu’honorable.