Une première tempête printanière ? (Ou plus ?)

Marktrapport

Jusqu’à présent, les marchés et l’économie ont relativement bien digéré le resserrement monétaire agressif de la Fed et des autres banques centrales. Au niveau mondial, la hausse des taux d’intérêt a jusqu’ici moins freiné la demande/croissance que ce que les banques centrales estiment nécessaire pour ramener l’inflation sous contrôle. Ces taux plus élevés n’ayant pas (encore) provoqué le ralentissement de croissance (la récession) redouté(e), les actifs risqués ont également bien résisté ces derniers temps. Cette "indifférence bienveillante" des marchés a été remise en question hier aux États-Unis.

Le marché a été secoué hier par l'augmentation de capital inattendue de la société mère de la banque SVB (Silicon Valley Bank). Cette dernière se concentre sur le marché de niche des entreprises en croissance et des start-ups (technologiques). En raison de la hausse des taux du marché monétaire due à la politique de la Fed, la banque a vu la concurrence et le coût d'acquisition de fonds à court terme augmenter considérablement. Dans le climat actuel, les clients de SVB trouvent également moins facilement du capital bon marché et font, dans la mesure du possible, davantage appel au crédit, ce qui n’est pas si évident dans un secteur où la rentabilité est souvent faible. En outre, la banque avait investi plus tôt dans le cycle une partie des fonds dans des titres à plus longue échéance et à des taux d’intérêt inférieurs à ceux actuellement proposés sur le marché. Face à la détérioration des financements à court terme, ces investissements ont dû être réalisés à perte. D’où l’augmentation de capital. SVB est active sur un marché de niche très spécifique. Pourtant, la nouvelle a provoqué pas mal de remous. Faut-il s'attendre à d'autres problèmes sur d'autres marchés de niche qui dépendent/dépendaient du capital bon marché ?

Le marché US a en tous les cas fortement réagi. Les bourses ont perdu jusqu’à 2,0 %. Les taux américains ont cédé jusqu'à 20 points de base (2 ans) et affichent encore aujourd'hui des reculs de l'ordre de 5 à 10 points de base sur un marché volatil. Ce matin, la réaction sur les marchés européens (pratiquement pas de répercussions hier) est plus modérée, mais est tout de même considérable (10 points de base). Les bourses américaines ont perdu jusqu'à 2.0 %. Aujourd’hui, l’Europe cède un peu plus de 1,5 %. 

Dans une perspective plus large, la question est de savoir si le resserrement agressif de la Fed et des autres banques centrales pourrait avoir un impact sur (le financement de) l’économie par d'autres canaux que la limitation de la demande. Restera alors à savoir si les possibles répercussions sur la stabilité financière seront une raison suffisante pour la Fed d'adapter (sous la contrainte) sa campagne de lutte contre l'inflation. Cette conclusion est pour le moment prématurée, mais un nouvel élément s'est clairement inséré dans le débat.

À cet égard, les "payrolls" américains se sont, comme prévu, retrouvés au centre de toutes les attentions aujourd’hui. Combinés aux chiffres de l’inflation prévus la semaine prochaine, ceux-ci devraient déterminer si la Fed va de nouveau relever son taux directeur de 50 points de base au lieu de 25 pb le 22 mars et si le marché se préparera à un pic du cycle à 6 % plutôt que 5,50 %. Dans le contexte d’incertitude actuel, il est fort probable que le marché n’ose pas tirer de grandes conclusions,  même en cas de "payrolls" solides. À l’approche du week-end, les investisseurs pourraient jouer la carte de la "sécurité", tout bénéfice pour les obligations d’État. Logiquement, il faudrait maintenant tenter de voir ce que les gouverneurs de la Fed pensent de tout cela. Malheureusement, la banque centrale américaine entame demain sa période de "blackout", au cours de laquelle elle s’abstient en principe de tout commentaire sur la politique monétaire à l’approche de la réunion. Terminons par quelques mots sur le dollar. Celui-ci n’a pas profité du climat d'aversion pour le risque hier. La baisse des taux US et le fait que la source d’incertitude se trouve aux États-Unis ne permettent apparemment pas au billet vert d'assumer son rôle de valeur refuge pour le moment. 

La quête de sécurité pousse les taux américains à court terme (2 ans) fortement à la baisse.

Bron: Bloomberg

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