La RBA rouvre une porte qui venait d'être fermée
À l’approche de l'audition du président de la Fed, Jerome Powell, devant le Congrès et surtout de la publication du rapport sur l’emploi aux États-Unis, quelques banques centrales de taille plus modeste font l'actualité cette semaine. Ce matin, c’était au tour de la banque centrale australienne. Celles de la Pologne et du Canada suivront demain. Et vendredi, Haruhiko Kuroda présidera sa dernière réunion de politique de la Banque du Japon.
Un statu quo est attendu pour les trois dernières. La Reserve Bank of Australia (RBA) a en revanche relevé son taux directeur de 25 points de base à 3,6 %. Il s'agit de son dernier fait d’arme dans la lutte qu'elle mène contre l’inflation. Au cours du trimestre précédent, la hausse moyenne des prix a atteint 7,8 % en glissement annuel, le rythme le plus rapide depuis le début des années 90. La RBA estime toutefois que le pire est passé, principalement au vu du ralentissement de l’inflation des marchandises. Dans le secteur des services, la pression haussière sur les prix reste obstinément élevée, alimentée par une demande intérieure toujours robuste. Celle-ci s'explique à son tour par la vigueur du marché de l’emploi et donc de la croissance salariale. La RBA craint déjà depuis quelque temps que cela provoque une spirale salaires-prix qui s'auto-alimente. Mais au vu des derniers chiffres disponibles, elle estime que ce risque est moins élevé aujourd’hui.
Selon les prévisions, l’inflation devrait ralentir cette année et la suivante pour finalement avoisiner la limite supérieure de 3 % de l’objectif vers la mi-2025. Pour parvenir à cela, la banque centrale évoque d’autres relèvements de taux. Une manière en outre de limiter le risque de voir le niveau élevé de l'inflation actuelle s'ancrer dans les prévisions des consommateurs et des entreprises.
Malgré la détermination affichée par la RBA, les taux swaps australiens ont plongé de 14 points de base sur la partie courte de la courbe. Le marché table sur un pic du taux directeur légèrement plus bas, de 4,15 % hier à grosso modo 4 % aujourd’hui. Le dollar australien recule, tant vis-à-vis du dollar que vis-à-vis de l’euro. Le cours AUD/USD quitte actuellement la zone de support de 0,67. Et le cours EUR/AUD teste un important niveau de résistance juste en dessous de 1,60. Il s’agit de la conséquence d’une petite (littéralement deux mots) mais importante modification dans la déclaration de politique, via laquelle la RBA entrouvre de facto la porte à une pause dans son cycle des taux. Cette même porte qu’elle avait pourtant (clairement) verrouillée il y a un mois. Cela montre à quel point il est difficile pour une banque centrale de vouloir combiner le meilleur des deux mondes, à savoir contenir l’inflation sans pour autant miner complètement l’économie.
Cet énième pivot de la RBA alimente les incertitudes et la volatilité, ce qui n'est jamais bon pour une devise de plus petite taille (par rapport au dollar US et à l’euro). Dans ce cas bien précis, cela entraîne également un désavantage de taux relatif pour le dollar australien. Le taux directeur de la RBA se rapproche clairement de son sommet. Aux États-Unis, la Fed ne pense pas encore à faire une pause. Et si cela ne tenait qu'au membre autrichien du conseil de la BCE, Robert Holzmann, Francfort procédera encore à quatre resserrements successifs de 50 points de base. Une rupture durable sous la barre de AUD/USD 0,67 signifie à court terme une nouvelle baisse en direction de 0,66. Pour la paire EUR/AUD, une reprise au-delà de 1,60 implique un retour au sommet de 2022, autour de 1,62.