Le Parlement rejette toute sortie sans accord
Deux des trois votes qui étaient prévus cette semaine au Parlement britannique ont déjà eu lieu. Le deuxième, celui d'hier, s'est soldé par un résultat qui n'était pas forcément attendu. Grâce à un amendement (qui n'était jusque là pas prévu), les députés ont rejeté "pour de bon" la possibilité d'une sortie de l'UE sans accord (le fameux "no deal"). Aujourd'hui, la chambre basse doit voter sur une possible prolongation de l'échéance du brexit. Mais il est encore impossible de dire combien de temps pourrait durer ce report. Tout dépendra vraisemblablement d'un troisième vote sur l'accord négocié par la Première ministre, Theresa May.
Lundi matin, May avait annoncé une avancée dans la question de la frontière irlandaise, LA pierre d'achoppement dans les négociations. Le geste du président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a néanmoins été jugé insuffisant pour garantir le caractère temporaire du filet de sécurité irlandais. Et le Parlement britannique a donc, pour une seconde fois, rejeté la proposition de la Première ministre. Le lendemain, les parlementaires ont dû donner leur avis sur la possibilité de quitter l'UE le 29 mars sans accord. Avant le vote, le parlement a, via un amendement, décidé de retirer les mots "le 29 mars" de la question qui était soumise aux députés afin de donner au résultat du vote un caractère permanent. Malgré les efforts déployés par le gouvernement May pour convaincre les conservateurs de voter contre cette motion, celle-ci a obtenu une (courte) majorité. Le Parlement a ainsi officiellement écarté le scénario d'un "no deal" en toutes circonstances, et donc pas uniquement pour le 29 mars. May avait pourtant compté sur ce point pour obtenir le soutien d'un nombre suffisamment élevé de ses coreligionaires. Bien que lourde de sens, cette décision n'a cependant aucun caractère contraignant. Le risque que les Britanniques quittent l'UE sans accord n'est donc pas encore totalement écarté.
Il n'y a donc aucune majorité en faveur de l'accord négocié par May et aucune majorité en faveur d'une sortie sans accord. À 15 jours de la prise d'effet de l'Article 50, un report de l'échéance est donc devenu inéluctable. Cela nous amène au troisième vote. D'après les prévisions, celui-ci devrait tout de même obtenir une majorité ce soir. La Première ministre ne lâche cependant rien et a, entre-temps, plaidé en faveur d'un nouveau vote sur sa proposition (le troisième). Si son accord obtient une majorité la semaine prochaine, elle propose de reporter la date butoir au 30 juin. Cela évitera au Royaume-Uni de devoir participer aux élections européennes de mai. En cas de nouvelle défaite, May estime que la durée du report sera beaucoup plus longue, ce qui obligera le pays à élire des eurodéputés. Vous suivez toujours?
Au cours des semaines qui ont précédé cette "semaine de votes" cruciale, la livre a gagné un peu de terrain. Hier, le rejet du scénario du "no deal" a poussé le cours EUR/GBP en direction de 0,85, le niveau le plus fort atteint par la monnaie britannique en presque deux ans. Le cours intègre donc déjà beaucoup de nouvelles positives à l'heure actuelle. Nous nous montrons par conséquent plus prudents en ce qui concerne une possible nouvelle appréciation de la livre en direction des prochains niveaux techniques de 0,83/0,8250. Pour cela, il faudrait une nouvelle avancée ou, par exemple, un rejet complet du brexit. Les incertitudes politiques sont cependant encore nombreuses et plusieurs scénarios possibles sont encore sur la table. Si les votes de ce soir et de la semaine prochaine débouchent sur une prolongation de l'Article 50, la saga du brexit entrera alors dans une nouvelle phase.