Probable renouvellement du statu quo pour l'OPEP+
L’Ever Given n’est plus, du moins virtuellement. Le porte-conteneurs de 400 mètres de long a bloqué pendant des jours tout le transit sur le canal Suez. Cet épisode a véritablement boosté la créativité des internautes. Avec succès, il faut bien l'avouer. Mais cette courte carrière de mème s’est terminée hier: après cinq jours, l’Ever Given a repris sa route. Les capitaines des centaines de navires en attente peuvent fermer 9GAG et Unilad. Il ont du pain sur la planche!
Le canal Suez est une axe stratégique, par lequel passe environ 12% du commerce maritime international. Un tel blocage ne va donc pas sans conséquences économiques, d’autant plus que les chaînes de distribution mondiales se trouvent déjà sous forte pression. Les dommages sont estimés à plusieurs dizaines de milliards. Le canal égyptien est également d’une grande importance pour le transport pétrolier, vu qu’environ 10% des échanges y transitent. Ces derniers jours ont donc été particulièrement agités sur le marché pétrolier. La pénurie de l’offre a pendant un moment pris le dessus sur les perturbations liées aux confinements et la contraction de la demande. L’or noir s'est ainsi redressé, d’environ 60 dollars le baril (Brent) en direction de 65 dollars.
Concernant l'offre, les principaux pays exportateurs de pétrole (OPEP+) tiendront leur réunion mensuelle de révision des quotas plus tard dans la semaine. Début mars, l’OPEP+ avait décidé de maintenir l'importante limitation de la production d’environ 8 millions de barils par jour au moins jusqu’en avril. Le cartel s’est laissé guider par la prudence: mieux vaut voir la reprise de la croissance avant d'y croire, dixit bin Salman, le ministre de l’énergie saoudien. Une surprise de taille qui avait poussé le prix du pétrole aux alentours de 70 dollars le baril le lendemain. Les paroles de Bin Salman se sont avérées prophétiques, puisque pratiquement toute l’Europe s'est de nouveau partiellement ou entièrement confinée depuis lors. Dans ce contexte, un renouvellement du statu quo ce jeudi est quasiment une certitude. Certaines sources ont confié à l’agence de presse Reuters que l’Arabie Saoudite pourrait même plaider pour une prolongation jusqu'à la fin du mois de juin. Le cartel accordera sans doute un petit extra à certains membres, comme il l’avait déjà fait plus tôt dans le mois. Pour la Russie, par exemple, le seuil de rentabilité se situe environ deux fois plus bas (entre 30 et 40 dollars le baril selon les estimations du FMI) que celui de l'Arabie saoudite (entre 60 et 80 dollars). Dépasser ce qui a été décidé dans les accords peut donc rapporter gros.
L’approche de l’OPEP+ pourrait jouer en faveur du pétrole dans les prochains mois. L’Asie, sous l'impulsion de la Chine, et les États-Unis se redressent relativement bien et rapidement, ce qui a un impact positif sur la demande. L’Europe est à la traîne, mais l’OPEP+ parvient à compenser cela avec l'actuelle limitation de l’offre. Le cartel ne devrait lever celle-ci que lorsque l'Europe aura entamé un mouvement de rattrapage. Une rupture au-dessus de 70 dollars, là où la tendance haussière s’était interrompue début mars, serait alors possible. Au niveau du plancher, un seuil de 60 dollars apparaît comme une importante zone de support.