La livre se heurte à son poids
À quoi devrait-on s'attendre pour le Royaume-Uni et la livre sterling? L'attention est aujourd'hui retombée après la surexposition à la fin de l'année passée. Comme prévu, les points conflictuels de l'accord sur le Brexit ont rapidement refait surface. En témoignent notamment les problèmes d'exportation du secteur de la pêche. Contrairement aux attentes, la livre sterling se porte plutôt bien depuis le début de l'année. La devise fait même aujourd'hui ce qu'elle n'avait malheureusement pas pu faire après l'accord de Noël: tester le niveau de support de EUR/GBP 0,8864 .
L'évolution du cours EUR/GBP durant les premiers jours de l'année n'a été qu'une pâle copie de celle du cours EUR/USD. Le vide redouté après la période intensive du Brexit ne s'est pas fait attendre. Le marché tente de trouver un autre sujet auquel s'accrocher. L'épidémie de coronavirus aurait pu s'imposer comme un thème, mais elle n'y est pas parvenue. Le Royaume-Uni a plus que jamais l'honneur peu enviable d'être le pays européen comptant le plus de cas et de décès. L'apparition de nouveaux variants a débouché sur de nouvelles mesures de confinement et d'intenses discussions à propos de la stratégie de vaccination à suivre. Le Royaume-Uni était déjà (économiquement) le cancre de la classe l'année dernière et cela ne devrait pas changer dans un avenir proche. Et pour simplifier, nous préférons passer ici sous silence les conséquences à plus long terme du Brexit dur. Malgré ces nouvelles peu réjouissantes, la livre sterling a donc tenu bon.
Le premier – et pour le moment le seul - à avoir jusqu' à présent eu une influence sur la livre sterling est le gouverneur de la Banque d'Angleterre, Andrew Bailey. Face à la détérioration des perspectives économiques, le débat autour des taux directeurs négatifs a lentement mais sûrement refait surface au Royaume-Uni. Mais Bailey y a directement opposé un “non" formel. Les obstacles à la mise en œuvre d'un tel taux sont trop élevés. Un pas en avant, deux pas en arrière. Le taux négatif a de nouveau été rangé au frigo et la livre a profité du soutien des taux d'intérêt sur la partie courte de la courbe des taux britannique. La position de Bailey n'empêche pas la banque centrale britannique de vouloir aussi maintenir une politique monétaire extrêmement souple pendant encore très longtemps. Tant via ses achats d'actifs que via le report sine die du premier relèvement de taux. Quoi qu'il en soit, l'intervention de Bailey a permis au cours EUR/GBP de flirter, contre toute attente, avec le niveau de 0,89.
C'est à partir de ce moment-là que s'est profilé le niveau de support technique de EUR/GBP 0,8764. Nous nous attendons à des dégâts sur la livre en cas d'échec du test. La livre se heurte provisoirement à son poids. Le cours EUR/GBP devrait évoluer plus haut dans la fourchette latérale située grosso modo entre 0,8864 et 0,9176/0,9292. Par rapport au dollar, le cours GBP/USD teste le niveau de reprise de 38% de la baisse de la livre sterling entre 2014 et 2020 (GBP/USD 1,3620). Ici aussi, une rupture durable (à la hausse) est plutôt improbable à court terme.
Mathias Van der Jeugt, salle des marchés KBC