La BoE ouvre encore plus les vannes
En plus des élections américaines, plusieurs réunions de banques centrales sont également au menu des marchés cette semaine. La Fed et les banques centrales tchèque et norvégienne décident ainsi de leur politique aujourd'hui. Demain, ce sera au tour de la banque centrale polonaise. Mais le coup d'envoi a été donné ce matin par la Banque d'Angleterre (BoE).
La Banque d'Angleterre a maintenu son taux directeur à 0,1%. Comme la plupart des autres banques centrales, la BoE passe actuellement par les achats d'obligations (d'État) pour assouplir sa politique. Le programme de la banque portait sur un montant total de 745 milliards de livres. En 2021, elle va acheter pour 150 milliards de livres supplémentaires d'obligations d'État, après l'expiration d'un précédent paquet de 100 milliards de livres à la fin de cette année. L'augmentation est un peu plus importante que prévu. Les rendements obligataires britanniques à long terme sont en légère baisse. Mais il faut cependant reconnaître que les taux à long terme sont sous pression partout dans le monde. Le taux britannique à 10 ans est passé sous la barre de 0,20%, mais n'est toutefois pas encore retombé à ses planchers de cet été. Il est frappant de constater que la BoE reste pour le moment vague en ce qui concerne l'instauration éventuelle d'un taux directeur négatif. Ce point doit encore être examiné plus en détail, selon le gouverneur Andrew Bailey. Les taux à court terme britanniques ne baissent déjà plus ce matin.
L'assouplissement est évidemment justifié par la dégradation de la situation économique. Après son effondrement au deuxième trimestre, la croissance s'est redressée au cours des trois mois qui ont suivi, mais ce rebond ne sera que temporaire. La recrudescence de la pandémie et les mesures supplémentaires prises pour tenter de l'endiguer vont entraîner une nouvelle contraction (-2%) au quatrième trimestre. Pour l'ensemble de l'année 2020, la BoE a revu ses prévisions à la baisse et table sur une contraction de 11%. L'économie britannique reste donc très inférieure à ses niveaux "pré-corona", comparé à de nombreuses autres économies développées. Selon les prévisions, elle ne devrait renouer avec ces niveaux qu'en début 2022. Toutes sortes de mesures de soutien fiscales ont récemment permis d'atténuer l'impact sur le chômage, mais la BoE s'attend à une hausse de celui-ci à 7,75% au deuxième trimestre de l'année prochaine. D'après la banque, l'inflation pourrait repartir en direction de 2,0% à la fin de l'année prochaine, même si la sous-utilisation de la capacité économique demeure importante.
Ce matin, la livre ne savait pas très bien comment réagir après l'assouplissement. Elle a, dans un premier temps, gagné un peu de terrain. Peut-être en raison des réserves de la BoE au sujet des taux négatifs. La décision prise aujourd'hui permet de clore provisoirement le débat autour de la nécessité de nouveaux assouplissements monétaires. Cela pourrait donner un peu de répit à la monnaie britannique. À court terme, le quotidien de la devise sera dicté par la saga du Brexit. Les dernières rumeurs sont à nouveau un peu moins enthousiastes, mais nous avons le sentiment que le marché des changes part du principe que les parties finiront par trouver "quelque chose". À un peu plus long terme, nous restons prudents à l'égard de la livre, surtout pour des raisons économiques. Comme aux États-Unis, la combinaison de soutiens budgétaires financés par le bilan de la banque centrale est négative pour la devise d'un pays affichant un déficit externe. Même en cas d'accord sur le Brexit, un recul prononcé et durable du cours EUR/GBP n'est pas garanti, en particulier si le débat autour d'un taux directeur négatif refait surface par la suite.