SPAC is back
Il n’y a pas (encore?) de SPAC cotée sur Euronext Bruxelles, mais la tendance n’aura pas échappé aux investisseurs belges. La semaine dernière, Avanti Acquisition a notamment entamé son parcours au NYSE gonflée à bloc avec une réserve de 600 millions d’euros. Détenue par l’Égyptien Nassef Sawiris et son partenaire GBL, cette SPAC a des vues sur des entreprises européennes. La question est de savoir si et quand une SPAC fera son entrée sur Euronext (Bruxelles) – et de préférence, une SPAC attirée par les nombreuses petites et moyennes entreprises européennes? Malgré le risque implicite pour la SPAC, cela pourrait réduire la décote à laquelle se négocient les (plus) petites entreprises (belges ou non).
Quoi qu’il en soit, les SPAC font leur grand retour dans l’alphabet de la finance. Dernièrement, de grands noms comme Nikola (via VectorIQ Acquisition) et Virgin Galactic (via Social Capital Hedosophia) ont été acquises via une SPAC publique cotée en bourse. Cela a accru l’intérêt pour ce type de sociétés. Début août, 62 “Special Purpose Acquisition Companies” avaient déjà levé 25 milliards de dollars sur la bourse américaine, contre 59 pour 14 milliards de dollars en 2019. Pourtant, le concept est loin d’être nouveau. En 2012, le groupe belge Electrawinds avait fusionné avec le véhicule d’investissement allemand ECT I. Mais depuis, nous en étions plutôt restés là avec ce type de “listings directs”.
Les SPAC sont des coquilles vides sans activités opérationnelles, mais qui lèvent des capitaux via une introduction en bourse sur la base de l’expertise et des lettres de noblesse du management et/ou des investisseurs. Ce trésor de guerre permet de donner la chasse à une entreprise cible, qui fait ensuite l’objet d’une cotation publique par le biais d’une acquisition inversée. Les investisseurs ne peuvent que s’interroger sur la nature de la cible, car les SPAC révèlent tout au plus le secteur qu’elles visent ou le sens de leurs efforts. Il peut dès lors s’agir de fintechs américaines, de perles européennes non cotées en bourse, d’une entreprise du secteur automobile ou chimique, voire de “petites ou moyennes entreprises”. Les investisseurs signent donc effectivement un chèque en blanc aux gestionnaires de la SPAC.
Néanmoins, les investisseurs d’une SPAC bénéficient d’une certaine protection. Si un accord est annoncé, ils peuvent encore échanger leurs actions contre leur investissement initial (déduction faite des frais). En outre, si un accord n’est pas conclu dans un certain délai (généralement de 24 mois), les investisseurs peuvent récupérer les espèces restantes. Pour encourager leur fidélité, les investisseurs reçoivent des warrants en plus des actions – un type d’options qui leur permet d’acheter des actions supplémentaires à un prix fixé à l’avance.
La popularité des SPAC est étroitement liée au fait qu’elles permettent aux entreprises cibles d’entrer rapidement en bourse, tandis qu’une introduction en bourse classique (IPO) peut facilement prendre un an. Les entreprises évitent ainsi certains risques liés au temps (par exemple, une dégradation des conditions de marché). De par sa nature (une fusion inversée), le parcours est en outre beaucoup moins complexe que celui d’une IPO classique. Enfin, il y a un aspect financier, car en passant par une SPAC, une entreprise opérationnelle ne doit pas nécessairement lever de l’argent frais et les actionnaires existants ne doivent donc pas non plus y consacrer des fonds supplémentaires. Par le truchement d’investisseurs professionnels, les SPAC proposent aux investisseurs un accès rapide à des entreprises jeunes et branchées qui gagnent ensuite en notoriété et en valeur marchande.
Jay Clayton, le président de la SEC, l’organisme de contrôle des marchés financiers américains, voit d’ores et déjà la popularité croissante des SPAC d’un bon œil. “Un peu de concurrence aux IPO classiques ne peut pas faire de mal. C’est donc sans doute une bonne chose”. Cependant, l’on peut noter que les SPAC doivent fournir très peu d’informations aux actionnaires potentiels et effectifs lors de leurs introductions en bourse. Ces informations comprennent les données de base relatives au financement, ce qui laisse en suspens le cours de l’IPO et la quantité de capital visée. La SEC envisage d’adapter quelque peu la réglementation, mais cela ne semble pas être pour demain. Il est donc encore temps de fonder des SPAC européennes et belges selon le modèle existant.
Tom Simonts, Senior Financial Economist KBC Group