De la Chine à la Pologne en passant par le Canada
D'un point de vue touristique, l'été 2020 restera dans les annales comme l'été du "staycation". Certains privilégiés ont récemment eu la chance de traverser des frontières, mais les zones interdites à cause du rebond de l'épidémie se multiplient sur la carte du monde. Cela fait longtemps que nous affirmons qu'il faut s'attendre à une reprise en dents de scie. Afin d'avoir tout de même un petit sentiment de vacances, nous nous lançons aujourd'hui dans un tour du monde économique. Point de départ: la Chine.
Le république populaire a été la première à être infectée par le nouveau coronavirus en début d'année. Les mesures de confinement drastiques qui ont alors été prises ont provoqué une contraction du PIB sans précédent de 10% au 1er trimestre. Alors que la pandémie continue de se propager en Occident, la clé de la reprise semble se trouver en Extrême-Orient. Les chiffres du PIB du 2e trimestre rendus publics ce matin font état d'une hausse de 11,5% sur une base trimestrielle (un taux de 9,6% était prévu). Ces derniers mois, une telle nouvelle suffisait à donner un nouveau coup d'accélérateur aux bourses. Cela n'a pas été le cas ce matin. Outre les chiffres du PIB, la Chine a également publié ses statistiques concernant les ventes au détail, la production et les investissements (juin). Ce sont surtout les chiffres décevants et négatifs (glissement annuel) de la consommation qui ont jeté un froid. Ceux-ci montrent que même le moteur chinois souffre toujours des séquelles du Covid-19. Les bourses chinoises ont perdu jusqu'à 5% ce matin. En Europe, les pertes après l'ouverture se limitent à 1%.
De la Chine, traversons le Pacifique, direction le Grand Nord. Hier, la banque centrale canadienne (BoC) a maintenu, comme prévu, son taux directeur inchangé à 0,25%. La BoC est d'avis qu'il vaut mieux prévenir que guérir. En affirmant qu'il faudra au moins deux ans pour que le pays puisse tourner la page du coronavirus, elle sous-entend que les taux resteront à leurs niveaux actuels pendant au moins autant de temps. En outre, la banque lie toute éventuelle hausse de taux à deux conditions: l'inflation doit évoluer de façon durable vers son objectif de 2% et les capacités excédentaires dans l’économie doivent s'être résorbées. Tant que ces deux conditions n'auront pas été remplies, l'économie pourra se redresser dans générer de pression inflationniste. Les achats d'actifs (actuellement 5 milliards de dollars canadiens) seront maintenus jusqu’à ce que la reprise soit bien engagée. L'instauration d'objectifs de taux explicites (contrôle de la courbe des taux) a été évoquée lors de la réunion, mais l'option n'a pas été retenue. Malgré ce ton accommodant de la BoC, le dollar canadien est parvenu à gagner du terrain hier. Le fait que la possibilité de taux directeurs négatifs n'ait pas été mise sur la table a certainement joué. Mais le dollar américain n'était pas non plus au mieux de sa forme et les prix pétroliers ont en outre repris 2%. La paire USD/CAD est finalement repartie à la baisse, en direction de 1,35. Et le cours pourrait encore s'affaiblir dans les prochains mois en raison de la dépréciation du dollar US.
Terminons par un petit détour en Pologne. Nous nous sommes déjà penchés sur les élections présidentielles polonaises la semaine passée. Ce week-end, le président Duda est parvenu de justesse à remporter un nouveau mandat. On doit donc s'attendre à un statu quo politique, au moins jusqu'aux législatives de 2023. Soit concrètement: une politique budgétaire expansive doublée d'une politique monétaire extrêmement souple, sans oublier les provocations de rigueur à l'encontre de l'Europe. Ce n'est un secret pour personne que la banque centrale "indépendante", le président polonais et le parti au pouvoir PiS regardent tous dans la même direction. Le zloty n'a quasiment pas bougé après l'annonce des résultats. Cette semaine, la vigueur de l'euro a tout de même poussé le cours EUR/PLN à tester le niveau de résistance de 4,5. Nous pensons que ce niveau va se maintenir et nous nous attendons plutôt à de légères fluctuations entre 4,35 et 4,50 à court terme.
Mathias Van der Jeugt, salle des marchés KBC