La Réserve Fédérale reste-t-elle plus optimiste que le marché?
La réunion du FOMC qui se tiendra mercredi est l'un des derniers événements susceptibles de venir troubler les marchés en 2018. La Réserve Fédérale relèvera plus que probablement le taux directeur pour la quatrième fois cette année, mais l'attention se focalisera surtout sur le "dot plot" et le commentaire que Jerome Powell formulera dans la foulée. Après la réunion de septembre, les gouverneurs de la Fed tablaient encore sur trois relèvements additionnels en 2019. Dans l'intervalle, les marchés freinent des quatre fers et ne comptent plus que sur un seul relèvement des taux d'intérêt l'année prochaine. La banque centrale américaine se ralliera-t-elle à cet avis?
Après la réunion de septembre, le message de la Fed était univoque: il serait encore procédé à un relèvement des taux d'intérêt en décembre et trois autres en 2019 (suivis d'un dernier en 2020). À première vue, les statistiques récentes ne nécessitent pas de changement de cap radical. Le taux de chômage est toujours historiquement bas (3,7%) et les indicateurs d'inflation affichent les niveaux souhaités. Au début du mois, la Fed a confirmé la vigueur générale de l'économie américaine. Mercredi soir, la dernière réunion de la Fed pour cette année se soldera donc pour ainsi dire à coup sûr par un quatrième relèvement des taux d'intérêt, de 2%-2,25% à 2,25%-2,50%. Il portera le taux directeur à la limite inférieure du niveau que la banque centrale américaine considère comme "neutre" pour l'économie — ni restrictif, ni stimulant. Mais que nous réserve 2019?
En dépit de la vigueur persistante de l'économie américaine, les marchés financiers sont entretemps devenus nettement plus circonspects. La crainte d'un ralentissement global de la croissance devient de plus en plus cuisante de semaine en semaine. Le conflit commercial toujours bien vivant avec la Chine et la dissipation des effets des incitants fiscaux du président Trump commencent à peser sur l'optimisme. Les investisseurs ne prêtent plus que peu d'attention aux statistiques économiques toujours vigoureuses et pensent à l'avenir. Difficile d'imaginer plus grand contraste par rapport au climat qui régnait lors de la réunion de septembre. La crainte d'une surchauffe de l'économie américaine et d'une éventuelle accélération du cycle de durcissement monétaire a cédé la place à une plus grande prudence. Les marchés ne tablaient de toute façon que sur deux relèvements des taux d'intérêt pour 2019, et ont au cours des dernières semaines revu cette estimation à un seul relèvement. Le marché n'attribue même plus qu'une probabilité de moins de 50% au scénario d'un relèvement des taux d'intérêt en mars 2019.
L'évolution récente des marchés des taux d'intérêt reflète les doutes qui tourmentent les marchés au sujet de la croissance. L'écart entre le taux à 5 ans et les taux à 3 et à 2 ans est déjà négatif, tandis que le différentiel entre les taux à 10 et à 2 ans affichait récemment un plancher cyclique de 11 points de base. Si le "dot plot" laisse toujours présager trois relèvements des taux d'intérêt pour 2019 après mercredi, cela signifiera une pression à la hausse pour l'extrémité courte de la courbe des taux américaine et un coup de pouce pour le dollar américain. Dans cette hypothèse, les perspectives de la Fed resteront positives. Rien ne garantit toutefois que le marché se rallie à cet optimisme, loin de là. Ce scénario pourrait raviver l'incertitude au sujet de la croissance, avec des retombées potentielles sur les actifs à risques. Si le "dot plot" ne suggère que deux relèvements des taux d'intérêt pour 2019, la réaction du marché pourrait aller dans le même sens, tout en étant moins prononcée. Le marché connaîtra dans cette hypothèse une période de fin d'année plus paisible.