À couteaux tirés

Les marchés

Faisons un instant abstraction de l'évolution désastreuse des cours qui a marqué la journée d'hier sur les marchés financiers. Ce n'est pas évident, je vous l'accorde, mais le fait est que nous avons déjà abondamment discuté de la cause sous-jacente – don’t mention the C-word –, et que nous en aurons encore plus qu'assez l'occasion dans un proche avenir. Au lieu de cela, nous nous proposons de revenir un instant sur le "B-word": le Brexit.

Le calme a fait son retour au Royaume-Uni depuis le début de cette année. Le résultat des élections a confié un mandat très clair à Boris Johnson et à son Parti Conservateur. Même le brouillard qui enveloppait le Brexit s'est quelque peu dissipé. Les statistiques se sont nettement améliorées (notamment les PMI reflétant la confiance des entrepreneurs), et la livre sterling déjà vigoureuse a poursuivi lentement sa progression. La principale explication à cette évolution réside dans la perspective typiquement à court terme du marché. Quiconque envisageait les choses à un peu plus long terme voyait déjà les nuages noirs s'amonceler.

Ces nuages noirs revêtent en l'occurrence la forme des négociations au sujet des relations commerciales futures entre l'Union européenne et le Royaume-Uni. Des négociations qui s'ouvriront la semaine prochaine. Le premier ministre Boris Johnson a d'ores et déjà présenté hier les lignes de force de son plan. Le fait que le Royaume-Uni s'efforcera de négocier une indépendance économique et politique maximale n'a en soi rien d'une véritable surprise. Il s'agissait là en effet du principal message de la campagne électorale de Boris Johnson l'année dernière: "take back control". La préférence de Boris Johnson va à un accord de libre-échange analogue à celui du Canada (l'AECG ou "CETA" en anglais). Cet accord ne prévoit presque pas de barrières douanières, n'exige pas l'application de la réglementation européenne, mais surtout: il ne prévoit pas la libre circulation des personnes. De l'avis de l'UE, une copie conforme de l'AECG n'est pas applicable en l'occurrence du fait du lien plus étroit (économique, mais aussi géographique) qui existe avec le Royaume-Uni. Boris Johnson veut aussi disposer d'un droit intégral à l'autodétermination sur le plan fiscal (impôts). Or, une telle autonomie pourrait sonner le glas du "level playing field" convenu avec l'ancienne première ministre Theresa May dans la "Political Declaration". Strictement parlant, le Royaume-Uni n'est cependant pas tenu de respecter ce document, puisqu'il ne revêt du point de vue juridique aucun caractère contraignant. Mais il y a évidemment de quoi froisser la confiance et plomber l'atmosphère autour de la table des négociations.

Sans compter que le temps presse. L'actuelle période transitoire s'achève en effet à la fin de cette année. Hier, Boris Johnson a même mis la barre un peu plus haut: les grandes lignes de l'accord commercial devront être définies d'ici juin. À ce moment, le premier ministre évaluera les progrès réalisés et décidera s'il poursuit les négociations ou s'il se retire au 10, Downing Street pour préparer son pays à un départ sans accord.

C'est donc à couteaux tirés que Boris Johnson prend le chemin de la table des négociations. Quoi qu'il en soit, ses propos font ressurgir le scénario tant redouté du Brexit sans accord, et cela n'a pas échappé au marché. La livre a perdu un point entier par rapport à l'euro. Le différentiel EUR/GBP (qui oscille actuellement aux alentours de 0,855) repart ainsi vers le haut du canal latéral de 0,83-86. Nous avions déjà mis en garde la semaine dernière contre une pause ou un revirement dans l'ascension de la livre. À l'approche des négociations et vu la fragilité du sentiment à l'égard du risque, nous ne voyons pour l'instant pas vraiment de raisons de changer d'avis.

EUR/GBP: Boris Johnson fait ressurgir le spectre du Brexit sans accord. La livre se retrouve sous pression.

Bron: Bloomberg

Disclaimer:

Ce document a été préparé par le desk KBC – Economic Markets et n'a pas été rédigé par le département Research.  Le desk est composé de Mathias Van der Jeugt, Peter Wuyts en Mathias Janssens, analysts  à KBC Bank N.V., entreprise réglementée par l'Autorité des marchés et des services financiers (FSMA). Ces recommandations de marché sont le résultat d'une analyse qualitative, dans laquelle il y a place pour l'expérience passée et les évaluations personnelles. Les avis sont basés sur les conditions actuelles du marché et peuvent être modifiés à tout moment. Les contributions les plus importantes proviennent de données accessibles au public, de nouvelles financières, de la politique économique et monétaire et d'analyses techniques actuelles. Le desk desk KBC – Economic Markets a fait des efforts raisonnables pour obtenir ces informations de sources qu'il considère comme fiables, mais le contenu de ce document a été préparé sans faire une analyse substantielle de ces sources. Aucune évaluation n'a été faite pour déterminer si ces informations sont appropriées ou non pour un investisseur particulier. Les avis sont nos avis actuels à la date indiquée sur ce document et peuvent différer des recommandations précédentes en raison de l'évolution des conditions du marché. Les auteurs ne garantissent pas l'exactitude, l'exhaustivité ou la valeur (commerciale ou autre) de ce document. De même, les auteurs ne sont pas responsables envers quiconque reçoit ce résumé de toute perte ou dommage (qu'il s'agisse d'un délit (y compris la négligence), d'une rupture de contrat, d'une violation de la loi ou d'autres obligations) résultant d'un acte ou d'une omission sur la base de ce contenu, ou de toute réclamation contre les auteurs concernant le contenu ou les informations contenues dans ce document. Toutes les opinions exprimées dans le présent document reflètent le jugement au moment de la préparation de l'examen et sont susceptibles d'être modifiées sans préavis. Étant donné la nature de cet avis (lié à la monnaie et aux taux d'intérêt), il n'est généralement pas de nature spécifique.   Il n'y a donc aucune référence à un quelconque contrat de financement d'entreprise et il n'y a donc pas de vue d'ensemble sur 12 mois basée sur les différents avis. Ce document n'est valable que pour une période très limitée, en raison de l'évolution rapide des conditions du marché.

Publications liées

Pas de Brexit monétaire

Pas de Brexit monétaire

Remise en question pour la Banque d’Angleterre

Remise en question pour la Banque d’Angleterre

Le FMI s’attend à une reprise lente et inégale

Le FMI s’attend à une reprise lente et inégale

Fitch met en garde la Belgique

Fitch met en garde la Belgique