L’euro ne pourra pas compter sur les PMI
Le coronavirus qui sévit actuellement en Chine a provoqué un léger mouvement de panique et d’aversion pour le risque sur les marchés financiers cette semaine. À l’instar de ce qui s’est passé avec le regain de tension entre l’Iran et les États-Unis en début d’année, nous pensons que le marché devrait à nouveau rapidement tourné la page. La bourse chinoise, qui a encore perdu 3% hier, vient de fermer ses portes pour une semaine à l’occasion des célébrations du Nouvel an chinois. Et aujourd’hui, le calme est déjà de retour. Hier soir, l’Organisation mondiale de la santé s’est voulue rassurante en expliquant que le virus ne constituait pas encore une menace de portée internationale pour la santé publique.
La Banque centrale européenne n’entend certainement pas non plus être une menace pour les marchés. En témoigne la conférence de presse relativement calme qu’a tenue la présidente de la banque, Christine Lagarde, au terme de la première réunion de l’année. Un costume d’employé modèle et sans relief aurait peut-être été plus approprié pour illustrer ses propos que la broche en forme de chouette, symbole de sagesse, qu’elle arborait au revers de sa veste. La BCE ne compte pas modifier sa politique monétaire dans un avenir proche. 2020 sera marquée sous le signe d’un audit interne dont le signal de départ a été donné par Lagarde hier. Les seules petites modifications apportées au communiqué, que la présidente a ensuite relativisées, concernent la "légère pression haussière sur l’inflation sous-jacente" et la "diminution" des risques baissiers dans le scénario de croissance de la banque centrale.
En ce qui concerne l’évolution de l’équilibre des risques, les chiffres parus aujourd’hui ont déjà de quoi un peu rassurer. L’indicateur de confiance des entreprises PMI (enquête auprès des directeurs d’achat) s’est ainsi stabilisé à 50,9 en janvier. Certains détails nous paraissent encourageants. À commencer par les deux poids lourds que sont l’Allemagne et la France. La légère progression dans ces deux économies a été grosso modo neutralisée par une stabilisation dans le reste de la zone. Le PMI de l’industrie manufacturière portée vers les exportations reste certes sous la barre qui marque la frontière entre contraction et croissance dans le secteur (50), mais il a tout de même surpris en passant de 46,3 à 47,8, son niveau le plus élevé depuis mai dernier. Les détails montrent que la production actuelle demeure assez limitée en raison de la faiblesse des nouvelles commandes, mais que les entreprises sont en train de préparer l’avenir. Elles ont de nouveau augmenté les recrutements et elles se montrent optimistes comme elles ne l’avaient plus été depuis un an et demi à propos des 12 prochains mois. La détente dans le conflit commercial qui oppose les États-Unis à la Chine et le désamorçage de la bombe Brexit ne sont pas étrangers à cette évolution. Le PMI du secteur des services a, contre toute attente, reculé de 52,8 à 52,2. La situation des les économies de services intérieures - qui soutiennent la croissance du PIB - n’a quasiment pas évolué par rapport à la fin de 2019. La baisse du PMI est essentiellement due aux grèves qui secouent la France (chemins de fer).
Les marchés ont démarré la journée de façon positive. La situation en Chine pèse plus dans la balance que les PMI. Les taux à 10 ans allemand et américain ont franchi des premières zones de support, autour de respectivement -0,3% et 1,7%. La question est de savoir si les PMI sont suffisamment solide pour "sauver" l’euro. La monnaie européenne a perdu du support vis-à-vis du dollar hier et cote en dessous de 1,1066. Si ce niveau se confirme à la clôture, le cours pourrait alors évoluer en direction de 1,0981 (niveau intermédiaire) et 1,0879 (niveau de clôture).
Mathias Van der Jeugt, salle des marchés KBC