BoE: abaisser ou pas abaisser? Telle est la question.
Le départ du gouverneur de la Banque d’Angleterre (BoE) Mark Carney pourrait faire plus de bruit que prévu. La faiblesse des données économiques et le récent discours tenu par certaines banques centrales ont en effet augmenté la probabilité d’une baisse de taux à la fin de ce mois.
La BoE évoque une baisse de taux
Le discours de la BoE a sensiblement évolué au cours de la semaine écoulée. La banque indique désormais que si les taux devaient être ajustés, ce serait à la baisse et que cet assouplissement pourrait déjà avoir lieu le 30 janvier. Cela fait déjà depuis le mois de novembre que deux des neuf membres du comité de politique monétaire (MPC) se disent en faveur d’un assouplissement, dans le but de donner de l’oxygène à l’économie britannique. Ces derniers jours, le gouverneur sortant de la banque, Mark Carney, et deux autres membres du MPC, Silvana Tenreyro et Gertjan Vlieghe, ont également tenu des propos allant dans ce sens. Jeudi, Carney a ainsi déclaré qu’il y avait suffisamment de marge pour ajuster la politique monétaire. Plus tard, Tenreyro a laissé entendre qu’elle pourrait voter en faveur d'une baisse de taux dans les prochains mois. Et Gertjan Vlieghe s’est également dit favorable à un assouplissement. Dans un entretien accordé au Financial Times, le Belge, qui est administrateur de la BoE depuis 2015, a expliqué qu’il voterait en faveur d’une réduction des taux si l’économie britannique ne montrait aucun signe d’amélioration. Si ce trio décide de rejoindre les deux dissidents (Haskell et Saunders) dans le camp de l’assouplissement, la baisse de taux sera alors acquise
Données peu réjouissantes
Les propos des banquiers centraux ne sont pas passés inaperçus sur les marchés, qui ont été surpris par cette brusque volte-face. Alors qu’ils évaluaient encore la probabilité d’une baisse de taux ce mois-ci à 5% mercredi, ce pourcentage a entre-temps grimpé à 49%. En outre, les données récemment publiés n’ont rien de réjouissant. Lundi, l’indicateur de la production industrielle s’est contre toute attente replié de 1,2% (en glissement mensuel). Les membres de la BoE ont donc déjà de quoi cogiter sérieusement. Le marché des changes en a tiré ses conclusions. L’euro poursuit sa remontée. Le cours EUR/GBP se rapproche d’un premier niveau de résistance autour de 0,859 (plus haut de décembre). Une rupture serait synonyme d’une dégradation technique de la livre sterling et mettrait (provisoirement?) fin à la dynamique positive dont elle bénéficie depuis les élections.
Mieux vaut toutefois ne pas tirer de conclusions hâtives. Les données ne sont certes pas réjouissantes, mais elles datent d’avant les élections. Les PMI qui seront publiés le 24 janvier risquent donc de peser lourd dans la balance. La situation n’est en outre pas totalement négative. Le sentiment s’est ainsi amélioré et les mesures budgétaires prévues par Johnson pourraient, à terme, donner un coup de pouce à l’économie. En outre, avec un taux directeur à 0,75%, la BoE ne dispose plus de beaucoup de munitions dans son arsenal. Est-il possible qu’elle brûle déjà toutes ses cartouches alors que des discussions commerciales compliquées s’annoncent? Carney aura peut-être à cœur de laisser quelques munitions à son successeur, Andrew Bailey...
Youssra El Nasire, salle des marchés KBC