Hong Kong: plus qu'une question locale?
Les marchés n'ont pas eu beaucoup de choses à se mettre sous la dent en début de semaine. Les données sont particulièrement rares en Europe et aux États-Unis, le Royaume-Uni est entré en campagne électorale et les investisseurs commencent à montrer des signes de lassitude face à la persistance de certains problèmes politico-économiques tels que le conflit commercial et le Brexit. La situation est en revanche beaucoup moins calme de l'autre côté de la planète. À Hong Kong, des milliers de manifestants sont dans les rues depuis des mois. À la base de ces protestations se trouve la crainte déjà présente depuis longtemps d'un renforcement de l'influence de la Chine continentale sur la région autonome. La goutte qui a fait déborder le vase est un projet de loi controversé censé permettre au gouvernement de Hong Kong de livrer des suspects à Pékin. Jusqu'il y a peu, le marché considérait ces troubles sociaux comme une question purement locale. Mais un projet de loi adopté hier aux États-Unis pourrait changer la donne.
Les manifestations à Hong Kong ont démarré en avril 2019, lors de l'introduction du fameux projet de loi controversé. Plutôt pacifique dans un premier temps, le mouvement s'est durci à partir du mois de juin, lorsqu'il est apparu que le gouvernement de Hong Kong n'avait aucune intention de faire marche arrière. Selon les opposants à ce texte, parmi lesquels le Royaume-Uni et les États-Unis, la loi allait limiter la liberté et l'autonomie de cette ancienne colonie britannique. En outre, la crainte était que l'on puisse utiliser cette loi pour réduire les dissidents au silence. Les États-Unis ont donc réagi. À la mi-octobre, la Chambre des Représentants a approuvé à l'unanimité un projet de loi apportant le soutien des États-Unis aux manifestants. Mardi, tous les membres du Sénat ont également voté en faveur d'un texte similaire et , hier, le Congrès a donné son feu vert, à une voix près, à une résolution allant dans le même sens. Celle-ci prévoit l'interdiction de vendre des équipements aux services d'ordre de Hong Kong et offre aussi aux États-Unis la possibilité de supprimer le régime commercial de faveur accordé à Hong Kong. Le texte sera présenté aujourd'hui pour signature au président, Donald Trump. En théorie, celui-ci pourrait y apposer son veto, mais il est peu probable qu'il le fasse étant donné le large soutien que cette résolution a reçu au Congrès. La Chine est furieuse. Elle a déjà mis en garde les États-Unis contre toute immixtion dans sa politique intérieure. Des mesures de rétorsion vont probablement suivre, mais leur contenu n'est pas encore connu à l'heure actuelle.
La manœuvre américaine n'aidera certainement pas à réchauffer des relations sino-américaines qui ont de nouveau subi un coup de froid récemment. Nous pensons évidemment à l'accord commercial partiel entre les deux pays. Sur le fond, les troubles à Hong Kong relèvent d'un enjeu de démocratie et n'ont en théorie rien à voir avec la politique commerciale chinoise. Mais le conflit sino-américain est (devenu) un enjeu tant politique qu'économique. Il est clair que la perspective d'une prochaine trêve dans le conflit commercial a pris du plomb dans l'aile. Citant des sources proches de la Maison Blanche, l'agence de presse Reuters a indiqué que l'accord pourrait être reporté à l'année prochaine. Ce matin, le vice-Premier ministre chinois Liu He s'est néanmoins encore dit "relativement optimiste" par rapport à un accord. Le ministère chinois du Commerce a également montré que la Chine était encore disposée à arrondir les angles. Les bourses (futures) sont actuellement dans le rouge, mais les taux européens et américains sont déjà parvenus à récupérer les pertes subies plus tôt dans la journée. Le cours EUR/USD s'est hissé à un niveau proche de 1,109. La prudence reste tout de même de mise à court terme. Dans le climat incertain actuel, dans lequel le marché est à la recherche d'un peu plus de certitude (données, signature de l'accord), la voie reste pour le moment celle de la moindre résistance.