Fin de la fiesta espagnole?

Les marchés

Le résultat des dernières élections législatives a remis le premier ministre espagnol Pedro Sánchez les deux pieds sur terre. Ce scrutin, le quatrième en quatre ans, a donné naissance au parlement le plus morcelé de l'histoire. Pedro Sánchez n'est pas parvenu à renforcer la position de son parti socialiste. Tel était pourtant son espoir, conforté par sa victoire électorale remportée six mois plus tôt. Par contre, ce qui s'était révélé impossible six mois durant a à présent été réalisé en 48 heures: une coalition avec le parti Podemos, encore davantage de gauche. Quoi qu'il en soit, il s'agit toujours d'un gouvernement minoritaire, qui aura besoin du soutien des partis régionaux. On est donc bien loin du retour espéré de la stabilité politique.

La déconvenue essuyée à la vue du résultat du scrutin sera sans doute encore aggravée par le refroidissement de la croissance économique. Durant les derniers trimestres, l'Espagne était l'un des piliers de la croissance dans la zone euro. En particulier en comparaison avec la dépression observée en Allemagne, la dynamique économique espagnole tenait remarquablement bon (voir illustration). Cependant, l'Espagne a également vu sa croissance ralentir au cours de l'année écoulée, principalement à cause de l'abrupt refroidissement de la croissance de la consommation des ménages. Un constat que l'on ne peut cependant pas attribuer à une augmentation insuffisante du pouvoir d'achat. La création d'emploi est en effet restée abondante et les salaires réels ont également connu une hausse non négligeable. Le chômage, lui, a encore diminué. Et pourtant, les Espagnols ont préféré épargner davantage, sans doute à cause de l'incertitude politique. À la mi-2019, le taux d'épargne était supérieur à celui relevé un an avant, et ce à concurrence de plus de 2,5% du revenu disponible des ménages. Cette augmentation est nettement plus marquée qu'ailleurs dans la zone euro. Dans ses récentes prévisions, la Commission européenne s'attend à voir la croissance de l'économie espagnole ralentir encore, jusqu'à retomber à 1,5% en 2020. Elle ne représenterait alors plus que la moitié de son niveau de 2016, mais resterait néanmoins supérieure à la moyenne de la zone euro (1,2%).

À noter cependant que l'impasse politique affecte à peine les finances publiques. Grâce à la conjoncture favorable, le déficit budgétaire s'est retranché en deçà des 3% du PIB et l'Espagne s'est extraite en juillet 2019 de la procédure réservée aux "déficits budgétaires excessifs". Elle était ainsi le dernier des 24 pays placés depuis 2011 sous la surveillance de l'Europe.

Cela ne veut toutefois pas dire que le budget espagnol ait été assaini. Le déficit structurel oscille toujours aux alentours de 3% du PIB. Selon les calculs de la Commission européenne, une détérioration en 2018-2019 pourrait être compensée en 2020-2021 en maintenant la politique actuelle. La dette publique (97,6% du PIB à la fin 2018) devrait continuer à diminuer, mais très lentement. Cette évolution suffira probablement à éviter à l'Espagne de se retrouver dans le collimateur des marchés financiers, en particulier aussi longtemps que la BCE continue à acheter des obligations d'État. La prime de risque sur les emprunts d'État espagnols est la plus basse observée depuis 2010. Cependant, le pays ne dispose pas d'une marge budgétaire suffisante pour conclure des accords politiques. Au lieu de cela, le ralentissement de la croissance économique risque de ramener davantage à l'avant-plan la nécessité de poursuivre l'assainissement structurel du budget. À mesure que l'allégresse alimentée par la croissance retombe, le budget a davantage tendance à devenir un obstacle politique supplémentaire.

La croissance de l'économie espagnole a tenu bon (variation annuelle en pourcentage du PIB réel)

Bron: Bloomberg

Disclaimer:

Ce document a été préparé par le desk KBC – Economic Markets et n'a pas été rédigé par le département Research.  Le desk est composé de Mathias Van der Jeugt, Peter Wuyts en Mathias Janssens, analysts  à KBC Bank N.V., entreprise réglementée par l'Autorité des marchés et des services financiers (FSMA). Ces recommandations de marché sont le résultat d'une analyse qualitative, dans laquelle il y a place pour l'expérience passée et les évaluations personnelles. Les avis sont basés sur les conditions actuelles du marché et peuvent être modifiés à tout moment. Les contributions les plus importantes proviennent de données accessibles au public, de nouvelles financières, de la politique économique et monétaire et d'analyses techniques actuelles. Le desk desk KBC – Economic Markets a fait des efforts raisonnables pour obtenir ces informations de sources qu'il considère comme fiables, mais le contenu de ce document a été préparé sans faire une analyse substantielle de ces sources. Aucune évaluation n'a été faite pour déterminer si ces informations sont appropriées ou non pour un investisseur particulier. Les avis sont nos avis actuels à la date indiquée sur ce document et peuvent différer des recommandations précédentes en raison de l'évolution des conditions du marché. Les auteurs ne garantissent pas l'exactitude, l'exhaustivité ou la valeur (commerciale ou autre) de ce document. De même, les auteurs ne sont pas responsables envers quiconque reçoit ce résumé de toute perte ou dommage (qu'il s'agisse d'un délit (y compris la négligence), d'une rupture de contrat, d'une violation de la loi ou d'autres obligations) résultant d'un acte ou d'une omission sur la base de ce contenu, ou de toute réclamation contre les auteurs concernant le contenu ou les informations contenues dans ce document. Toutes les opinions exprimées dans le présent document reflètent le jugement au moment de la préparation de l'examen et sont susceptibles d'être modifiées sans préavis. Étant donné la nature de cet avis (lié à la monnaie et aux taux d'intérêt), il n'est généralement pas de nature spécifique.   Il n'y a donc aucune référence à un quelconque contrat de financement d'entreprise et il n'y a donc pas de vue d'ensemble sur 12 mois basée sur les différents avis. Ce document n'est valable que pour une période très limitée, en raison de l'évolution rapide des conditions du marché.

Publications liées

La MNB en revient à la prudence

La MNB en revient à la prudence

Les PMI pointent une accélération de la croissance et de l’inflation dans l'UEM

Les PMI pointent une accélération de la croissance et de l’inflation dans l'UEM

La livre en chute libre

La livre en chute libre

Pas de Brexit monétaire

Pas de Brexit monétaire