Secteur automobile: d'abord la source de tous les maux et bientôt le sauveur?
L'heure est aux révisions à la baisse des perspectives de croissance. Les organismes internationaux et nationaux se bousculent pour publier leurs nouvelles prévisions, et les nouvelles n'ont rien de réjouissant. Les coupables qui sont à l'unanimité pointés du doigt pour justifier la détérioration du climat sont les mêmes qu'à l'accoutumée, le Brexit et le conflit commercial en tête. La détérioration persistante de nombreux indicateurs du sentiment, en particulier, pèse sur les prévisions. Si nous passons en revue les différentes activités économiques pour épingler les principaux coupables, nous constatons que c'est surtout l'industrie qui est responsable du refroidissement de l'économie. Une industrie au sein de laquelle le secteur automobile joue un rôle crucial.
Le secteur automobile est de nos jours confronté à de nombreux défis. Il subit un choc négatif non seulement du côté de l'offre, mais aussi du côté de la demande. Les consommateurs ont en effet tendance à différer leurs grosses dépenses lorsque l'incertitude économique prend le dessus. Et l'achat d'une voiture en fait évidemment partie. Par ailleurs, la réglementation changeante et surtout incertaine au sujet des normes environnementales pour les nouveaux véhicules fait hésiter le consommateur lors de son achat. La modification des normes environnementales a également des retombées sur l'offre. La transition écologique affecte tout particulièrement l'industrie automobile allemande. À cela s'ajoutent le ralentissement de l'économie mondiale et, surtout, les tensions commerciales. Les décisions politiques prises en Chine, que ce soit dans le domaine du commerce ou des efforts pour rendre le parc automobile chinois plus écologique, ont un impact direct sur les producteurs automobiles européens. La production automobile européenne a ainsi une grande part de responsabilité dans l'affaiblissement de la production industrielle. Les prestations médiocres du secteur automobile s'assortissent malheureusement de lourdes retombées pour nombre d'autres secteurs du fait de sa forte intégration avec différents autres secteurs, qui vient s'ajouter à une étroite imbrication internationale.
À ce titre, les évolutions qui attendent le secteur automobile européen seront cruciales pour les prestations macroéconomiques futures. Que ce soit pour son timing ou son amplitude, la reprise qui succédera à l'affaiblissement économique actuel dépendra de l'évolution du secteur automobile. Ce secteur mérite donc toute notre attention. La récente décision du gouvernement allemand de lancer un plan de lutte contre les changements climatiques, par exemple, revêt une importance cruciale pour le secteur. Un volet substantiel du plan a trait au subventionnement de la transition écologique dans le secteur automobile, et pourrait donc imprimer un élan positif au secteur. Il est d'ailleurs clair qu'en marge de l'obtention de davantage de certitudes au sujet des normes qui seront effectivement imposées, le secteur automobile allemand attend aussi un soutien de la part des pouvoirs publics avant d'initier véritablement la transition écologique.
Les développements récents indiquent que les évolutions macroéconomiques sont souvent à attribuer à une multitude de défis microéconomiques. Et un secteur spécifique, qui n'est certes qu'une araignée dans la toile de l'économie européenne, est aujourd'hui investi d'une énorme responsabilité à l'égard de notre prospérité dans son ensemble.
Jan Van Hove, KBC Group Chief Economist