Les statistiques économiques supplantées par le risque lié aux événements
Décompression. Les marchés ont poussé un soupir de soulagement hier, profitant de cette journée paisible pour digérer la déception créée la semaine dernière par une série de statistiques américaines. Les bourses européennes ont amorcé une remontée, tout comme les taux d'intérêt européens et américains. Le différentiel EUR/USD a passé la journée à l'ombre du seuil de 1,10. Le sentiment à l'égard du risque reste cependant fragile. Cette semaine, les statistiques seront reléguées à l'arrière-plan pour céder la place au risque lié aux événements géopolitiques et aux discours/procès-verbaux des banquiers centraux.
Par ordre chronologique, nous aurons d'abord droit ce soir à un discours du président de la Fed, Jerome Powell. Jerome Powell fait partie du camp de la Fed qui prône la prudence, partant du principe qu'il vaut mieux abaisser le taux directeur par anticipation qu'attendre que la tourmente économique se déchaîne. La réunion de septembre a révélé des dissensions internes quant à la stratégie à adopter dans les prochains mois. Deux blocs minoritaires sont en train de se former: l'un autour des membres de la Fed qui jugeaient le précédent abaissement des taux inutile, et un autre autour de ceux qui veulent pour toute certitude encore abaisser le taux directeur de 25 points de base cette année ou l'année prochaine. Depuis les statistiques décevantes publiées la semaine dernière, plusieurs gouverneurs de la Fed ont explicitement admis qu'ils gardaient toutes les options ouvertes pour la réunion d'octobre. Plus tôt que prévu, donc. Dans l'intervalle, le marché est d'avis qu'il y a de grandes chances que les taux soient abaissés de 25 points de base pour la troisième réunion consécutive. Reste à voir si Jerome Powell entrouvrira davantage la porte à un nouvel abaissement des taux.
Le deuxième thème de la semaine a trait aux négociations commerciales entre la Chine et les États-Unis. Le vice-premier ministre chinois Liu He sera présent à Washington à partir de jeudi. Les marchés se raccrochent surtout à l'idée que les deux parties cherchent à nouveau un terrain d'entente, plutôt que de se laisser décourager par certaines rumeurs et actions isolées. Officiellement, le président Trump ne se contenterait par exemple toujours pas de semi-accords, contrairement à la Chine. Pour lui, ce serait tout ou rien. Par ailleurs, des pratiques comme le boycott chinois de la diffusion des matches de la NBA ou l'exclusion par les États-Unis des entreprises technologiques chinoises (caméras de surveillance, intelligence artificielle…) montrent bien que tous les moyens sont bons pour obtenir une position de force à la table des négociations (commerciales).
Reste enfin la saga du Brexit. Le parlement britannique est suspendu en attendant le discours de la Reine prévu pour le 14 octobre. Boris Johnson ne disposant plus d'une majorité au parlement, ce discours promet de revêtir la forme d'un manifeste électoral conservateur. Le premier ministre britannique préfère de toute évidence sa campagne électorale au Royaume-Uni à une visite aux capitales européennes dans une tentative de décrocher un accord. Différents médias indiquent que son entourage se prépare à rejeter sur le parlement récalcitrant (obligation de reporter la date butoir du Brexit au 31 janvier) et l'Europe (aucune disposition à négocier au sujet des nouvelles propositions pour le "backstop" irlandais) la faute de l'échec de Boris Johnson dans sa mission. D'entrée de jeu, il avait en effet crié à qui voulait l'entendre que le 31 octobre était une date butoir impérative. Et que le Royaume-Uni quitterait l'UE à cette date, avec ou sans accord. La date ultime pour solliciter un report auprès de l'UE est le 19 octobre. Si l'opposition obtient des certitudes à ce sujet, nous nous attendons à une chute du gouvernement et à de nouvelles élections.