La couronne ne profite pas du relèvement de taux de la Norges Bank
Hier, quatre banques centrales ont décidé de leur politique. Trois ont laissé leur taux directeur inchangé: la Banque d'Angleterre (BoE), la banque centrale suisse et la Banque du Japon (BoJ). La BoE est toujours confrontée aux incertitudes liées au Brexit et n'a pas encore donné de détails sur la manière avec laquelle elle réagira en cas de sortie chaotique de l'UE. La banque centrale suisse et la Boj se trouvent quant à elles dans la même situation. Elles sont toutes les deux pressées d'assouplir leur politique, principalement afin de lutter contre un renforcement indésirable de leur monnaie. Les deux institutions ont néanmoins déjà été très loin dans leur politique non conventionnelle et ont quasiment épuisé tout leur arsenal monétaire. Elles évoquent bien la possibilité d'un nouvel assouplissement, mais elles préfèrent pour le moment garder ce dernier atout en main. La banque centrale norvégienne est en revanche un cas à part, comme nous vous l'expliquons ci-dessous.
La Norges Bank (NB) a relevé son taux directeur de 25pb à 1,5%, son quatrième resserrement depuis le début du cycle de normalisation il y a un an. Elle va donc à contre-courant de la tendance générale, puisque la plupart des banques centrales sont tentées d'assouplir leur politique afin d'éviter que leur activité intérieure ne soit heurtée par les répercussions de la guerre commerciale actuellement en cours. Le marché n'était donc pas sûr que la NB allait franchir ce pas. Les arguments avancés par la NB répondent à un raisonnement économique "classique", que nous n'avons plus vraiment l'habitude d'entendre. L'économie se porte bien. La reprise de l'activité déjà observée dans le secteur pétrolier se reflète maintenant aussi au niveau de la croissance intérieure. L'économie "continentale" a ainsi progressé à un rythme soutenu de 0,7% en glissement trimestriel au deuxième trimestre. Cette cadence ne pourra évidemment pas être tenue, mais la NB estime que l'économie devrait continuer à enregistrer un taux de croissance supérieur à son potentiel. L'inflation générale a ralenti à cause de la baisse des prix de l'énergie à 1,6%, mais l'inflation de base (sans les modifications fiscales et l'énergie) s'est établie à 2,1%, soit au-dessus de l'objectif de 2,0%. D'où la décision de la banque de mettre un terme à sa politique accommodante. Contrairement à beaucoup d'autres banques centrales, la NB souligne également que des taux plus élevés permettent d'éviter une hausse indésirable de la dette et de l'inflation des prix immobiliers.
La NB reste modérément positive en ce qui concerne la croissance future, mais elle ne peut pas non plus fermer les yeux sur le contexte international. La légère diminution des prévisions de croissance et d'inflation comparé au rapport du mois de juin a poussé la banque à revoir l'évolution attendue de son taux directeur à la baisse. Seule une hausse de taux marginale sera encore nécessaire pour maintenir l'inflation sur la bonne voie.
Ce dernier point n'a pas échappé au marché (des changes). Ainsi, la couronne norvégienne, qui s'était appréciée directement après l'annonce du relèvement de taux, a rapidement fait machine arrière. Le marché est en effet arrivé à la conclusion que le cycle de normalisation était pratiquement terminé en Norvège. Malgré l'augmentation des taux l'année passée et une solide performance de l'économie, la couronne reste donc faible. Elle est même plus faible que ce que la NB avait elle-même anticipé. La banque centrale soutient même que la faiblesse de la couronne est un facteur qui pousse l'inflation à la hausse, mais le marché ne croit pas que cet argument suffira à justifier un nouveau resserrement des taux. Comme cela a déjà été observé à plusieurs reprises dans le passé, les monnaies de taille plus modeste, avec une liquidité relativement limitée, éprouvent souvent des difficultés dans un contexte d'incertitude généralisée et ce, même lorsque l'économie se porte bien. Malgré sa faiblesse historique, il semble donc que la couronne aura surtout besoin d'un recul des incertitudes et/ou d'une hausse surprise des prix pétroliers pour se redresser.